Les retards de paiement touchent majoritairement les TPE (36 jours), alors que 95% d’entre elles paient leurs fournisseurs à moins de 60 jours


«Les délais de paiement en France : point sur la période 2014-2015 », rapport annuel de l’Observatoire des Délais de Paiement N°830-2015, février 2016

Les ratios des délais moyens calculés pour 2014 sont des estimations semidéfinitives basées sur environ 2 millions de liasses fiscales représentant plus de 80% du chiffre d’affaires des unités légales du champ. Ils sont calculés à partir de la base de données Esane de l’Insee.

 

Entre 2000 et 2014, les entreprises ont réduit le délai de règlement de leurs fournisseurs dans une proportion qui représente en moyenne 17 jours d’achats ; elles ont aussi réglées plus rapidement, le délai clients en 2014, étant en moyenne plus court de 11 jours de chiffre d’affaires, comparé à 2000.

En 2014, les délais clients moyens nets des acomptes s’élèvent à 44 jours de chiffre d’affaires comme en 2013. Les délais fournisseurs moyens nets des acomptes augmentent de 2 jours à 56 jours d’achats.

 

Cette baisse tendancielle des délais de paiement n’a toutefois pas contribué à alléger globalement la charge financière pesant sur les entreprises ; par ailleurs, une réduction plus forte des délais fournisseurs que des délais clients se traduit par une dégradation du solde commercial pour les entreprises. Ainsi, après une brève amélioration en 2011, le solde commercial a augmenté d’un jour en 2012 puis en 2013. Il reste stable en 2014 pour atteindre 12 jours de chiffre d’affaires à cette date, son plus haut niveau depuis 15 ans.

 

La situation s’aggrave encore dans la construction, alors que le solde du crédit interentreprises est mieux orienté pour l’industrie et les transports. Les services aux entreprises, dont l’information, communication subissent un décalage de trésorerie particulièrement important, alors que le commerce et l’hébergement‑restauration bénéficient d’un avantage structurel (paiement très rapide) :

En jours

Nombre d’entreprises

Délais clients

Délais fournisseurs

Solde commercial

 

2007

2013

2014

2007

2013

2014

2007

2013

2014

Total

172 700

50,1

44,8

44,0

60,6

51,5

51,0

11,3

11,6

11,8

Information-communication

4 700

86,8

77,5

77,7

78,7

71,3

71,3

45,8

41,1

42,0

Services aux entreprises

17 700

82,0

77,1

76,0

68,9

62,0

60,9

49,2

48,1

47,8

Construction

27 900

66,2

64,3

63,0

69,2

58,1

54,8

23,2

27,5

28,4

Industrie

26 700

68,8

56,3

55,8

70,8

56,8

55,9

23,7

20,1

20,1

Transports, entreposage

7 300

58,2

55,0

53,8

47,3

43,3

41,6

29,3

28,0

27,9

Commerce

70 700

31,7

26,4

25,8

51,6

43,2

42,0

-8,6

-7,0

-6,7

Activités immobilières

2 800

23,8

27,6

25,9

56,1

56,6

58,2

3,3

6,7

4,9

HCR

8 100

6,3

4,8

4,4

49,7

45,2

43,8

-17,7

-18,5

-18,1

La baisse des délais concerne toutes les tailles d’entreprises :

En jours

Nombre d’entreprises

Délais clients

Délais fournisseurs

Solde commercial

 

2007

2013

2014

2007

2013

2014

2007

2013

2014

Total

172 700

50,1

44,8

44,0

60,6

51,5

51,0

11,3

11,6

11,8

TPE

124 500

46,4

41,8

40,9

58,6

49,6

47,9

8,2

9,0

9,2

PME

43 300

59,1

52,6

52,2

65,2

55,9

55,0

19,3

18,7

19,0

ETI

4 700

62,1

52,6

52,5

69,6

60,6

60,3

16,2

13,0

13,0

Grandes entreprises

200

50,6

47,1

48,0

71,1

62,2

63,4

6,9

8,9

8,1

En 2014, 32% ont un délai client supérieur à 60 jours ; 29% paient leurs fournisseurs après 60 jours d’achats, correspondant à des retards d’une durée moyenne de 31 et 22 jours ; en 2007, elles étaient 40% du côté clients et 45% du côté des délais fournisseurs pour une durée moyenne de 35 et 31 jours. Les retards sont inférieurs à 1 mois (dans 62 % des cas du côté des délais clients et 66 % du côté des délais fournisseurs), et les retards les plus longs baissent tendanciellement.

 

Les retards de règlement, en hausse rapide et continue depuis le printemps 2014, avaient atteint au début de l’été 2015 leur pire valeur depuis dix ans, à 13,6 jours ; Au cours du troisième trimestre 2015, le retard moyen global calculé sur l’ensemble des factures analysées est de 13,2 jours.

 

Une amélioration des comportements de paiement est constatée au cours du troisième trimestre 2015 chez tous les entrepreneurs individuels, davantage sensible chez les plus grands d’entre eux ; le retard moyen des sociétés commerciales est généralement supérieur d’une journée à celui constaté chez les entrepreneurs individuels

AU 3éme trimestre 2015

Construction

Services aux particuliers

Commerce

Activités financières

services aux entreprises

HCR

Industrie

Transports

Paiement sans retard

45,8

41,7

36,1

35,2

31,6

30,3

28,9

21,7

retard inférieur à 30 jours

47,3

47,7

57,0

57,9

60,1

58,1

65,6

69,7

retard supérieur à 30 jours

6,9

10,6

6,9

6,9

8,3

11,6

5,5

8,6

Les retards de paiement touchent majoritairement les TPE (36 jours), et les PME (29 jours), moins les ETI (20 jours) et bien moins les GE (10 jours). Par contre les TPE paient en moyenne à 13 jours, les PME à 27 jours, les ETI à 40 jours et les grandes entreprises à 45 jours.

 

La loi prévoit en outre le versement d’intérêts sur les créances en retard de règlement (pénalités de retard), mais donne toute latitude aux entreprises pour le définir, en établissant un taux minimal (2,79% au premier semestre 2015) et un taux supplétif (10,05% au premier semestre 2015) ; sur ce point, l’enquête montre que plus la taille de l’entreprise augmente, moins le taux minimal est retenu.

 

D’autre part, les entreprises interrogées notent que le taux de dédommagement spontané est quasi nul de la part des grandes entreprises (1%) et des établissements publics (5%) ; cette obligation légale est plus fréquemment pratiquée par les collectivités locales (17%) et l’État (19%). En outre de nombreux écarts à la loi sont relevés concernant le versement même des pénalités dues en cas de retard : un débiteur sur quatre verse à son créancier le dixième des pénalités de retard ou intérêt moratoires dus. Quant à l’indemnité forfaitaire de recouvrement de 40€, elle est réglée par un débiteur sur quinze, le créancier recevant en moyenne le trentième des indemnités dues.

 

La CGPME souligne les difficultés récurrentes à adopter des pratiques conformes à la loi : sur les 173 entreprises du panel, la situation ne s’est pas améliorée en 2015, puisque plus d’un tiers des entreprises interrogées ont vu leurs délais de paiement s’allonger par rapport en 2014. À l’inverse, pour moins de 10% d’entre elles, la situation s’est améliorée.

Dans le secteur du bâtiment, la CAPEB et la FFB observent que l’augmentation des délais clients est la principale cause des tensions sur la trésorerie ; selon la CAPEB, 59% des TPE font état d’un besoin de trésorerie supérieur à 10 000 euros.

 

Les principaux « responsables » seraient les grandes entreprises, les collectivités territoriales et l’État ; les retards de paiement moyens sont évalués entre 22 et 25 jours de chiffre d’affaires.

Le secteur de l’approvisionnement de la construction est particulièrement touché, avec des retards d’une durée moyenne de 54 jours de chiffre d’affaires se concentrant sur seulement 10% des clients, principalement des grandes entreprises et l’État (39% des règlements se font après 60 jours). À l’inverse, selon l’étude, la clientèle « artisans/PME/commerçants » est particulièrement vertueuse puisque 95% paient les entreprises interrogées à moins de 60 jours

Noter qu’à partir de 30 jours de retard, la probabilité de défaillance du client est multipliée par 6.

Dans les faits, très peu d’entreprises perçoivent spontanément les pénalités de retard ou les intérêts moratoires (davantage versés par le secteur public que par les entreprises privées). 17% des entreprises déclarent les réclamer lorsque ces derniers sont des PME, 11% quand il s’agit de grandes entreprises et seulement 5% pour le secteur public (enquête CGPME).

 

Pour le secteur public d’État, le délai global reste inférieur au délai réglementaire de 30 jours applicable aux marchés publics : le taux des dépenses payées en moins de 30 jours reste à un niveau très élevé (85% fin décembre 2015).

Toutes catégories de collectivités locales et d’établissements publics confondues, le délai global de paiement passe de 28,6 jours en 2014 à 28,2 jours fin novembre 2015, inférieur au délai réglementaire fixé dans la plupart des cas à 30 jours ; toutefois les difficultés de trésorerie de certains et le tarissement des ressources budgétaires (des collectivités locales) semblent affecter le délai global de paiement aux fournisseurs sur les trois dernières années, la région connaissant le plus de difficultés.

 

En Europe le retard moyen global est quasi stable, à 14,5 jours au troisième trimestre 2015. Le Portugal et l’Italie demeurent les mauvais élèves, avec respectivement 30 et 20 jours de retard. L’Allemagne continue de montrer l’exemple, avec un retard moyen proche de 6 jours.

 

Le contrôle des délais de paiement par la DGCCRF en 2014 et 2015 a porté prioritairement sur le secteur du transport et du fret, le secteur du bâtiment hors marchés publics, le secteur de la grande distribution, hors secteur vitivinicole, et le secteur de l’automobile ; 2 567 établissements ont été vérifiés en 2015 pour 6073 actions de contrôle ; le niveau d’anomalies s’établit à 20% avec un montant de 2,6M€ d’amendes.