Si une majorité de TPE/PME avaient renforcé leurs fonds propres avant la crise sanitaire, 20% étaient en difficulté.


"Les fonds propres des TPE et PME", Observatoire du financement des entreprises, mai 2021

L’Observatoire du financement des entreprises (OFE) a été créé en 2010 à la suite d’États généraux de l’industrie qui avaient mis en évidence des lacunes en matière d’information sur le financement des entreprises. Pour y remédier, le Gouvernement a décidé de créer un observatoire dédié, avec pour objectif de dégager une vision commune sur les questions du financement des entreprises et particulièrement des PME.

Ses rapports sont publics et accessibles sur le site de la Médiation du crédit aux entreprises (https://mediateur-credit.banque-france.fr/liste-chronologique/les-rapports-de-lobservatoire-du-financement-des-entreprises).

 

Du fait de la crise sanitaire, 43% des dirigeants de TPE/PME font état d’un recul du niveau de leurs fonds propres, 16% déclarant que leur niveau des fonds propres constitue une contrainte forte pour aborder la phase de reprise.

⇒ Les PME et TPE ont sensiblement renforcé leurs fonds propres depuis 2011

Une croissance moyenne de près de 6% par an, contre 4,3% pour les ETI et 2,6% pour les grandes entreprises sur la même période a permis des reports à nouveau apportant une contribution de plus de la moitié de la croissance de capitaux propres, alors que les augmentations de capital (capital social et primes d’émission) ne représentant que 20% de la croissance des capitaux propres.

 

♦ Les PME

 

Les PME ont très fortement accru la part des capitaux propres dans le total de leurs ressources, passant de  37,8% en 2007 à 41,4%. 

Par ailleurs le taux d’endettement financier brut des PME connaît une baisse importante et continue : corrigée des doubles comptes, la dette financière en 2019 est de 77% des capitaux propres pour les PME, 111% pour les ETI et 125% pour les grandes entreprises.

 

♦ Les TPE

 

Les fonds propres des TPE progressent fortement en 2015 et 2016 (+ 9% par an), puis ralentissent en 2017 et 2018 (+ 6% et + 5%) ; en 2015 et 2016, les résultats mis en réserve ont contribué pour 7% contre 2% pour le capital externe. En 2017 et 2018, la croissance plus modérée résulte d’une moindre progression des résultats.

 

En 2018, les fonds propres représentent 36% du total de bilan des TPE en 2018, devant les dettes financières (29%), les autres dettes courantes (21%) et les dettes fournisseurs (10%).

La part des fonds propres passe de 32% en 2014 à 36% en 2018.

La part des résultats s’accroît dans le bilan des TPE, de 16% en 2014 à 20% en 2018 d’où une progression de l’autofinancement  et un recul du financement externe ; le poids du total des dettes dans le bilan passe de 64 en 2014 à 60% en 2018.

 

Entre 2014 et 2018, la part des ressources stables progresse de 64% à 66%, l’augmentation des fonds propres faisant plus que compenser le recul des dettes financières et constitue des sources de financement de moyen long terme pour les investissements.

 

Cette amélioration concerne tous les secteurs d’activité, notamment les HCR et les services aux particuliers, avec une progression proche de 20% du fait du dynamisme des résultats réinvestis. Toutefois, les TPE des HCR, des services aux particuliers et de l’immobilier restent les moins capitalisées, la part des fonds propres y étant inférieure à 30%. À l’opposé, les TPE des services aux entreprises et celles de l’informatique-communication sont les plus capitalisées avec respectivement 45% et 41%, contre 32% pour l’ensemble des autres secteurs.

 

Cette part importante de fonds propres s’explique d’abord par le poids élevé du capital social (21% contre 12% en moyenne pour l’ensemble des autres secteurs).

Dans les services aux entreprises, le niveau élevé est également imputable à la part des résultats (22%).
Dans l’informatique-communication, la part du capital social dans le bilan est supérieure à celle des résultats (21% et 15% respectivement).
Dans ces deux secteurs, on y trouve une part élevée de jeunes entreprises innovantes, des start-up très intégrées dans l‘économie numérique, des créateurs très qualifiés, des apports en capital initiaux élevés, et une importance du financement externe non bancaire (émission d’actions, recours aux business angels, aux fonds d’investissement en capital-risque, etc.).

Dans la plupart des activités, cette diminution résulte d’une moindre progression des dettes financières par rapport à celle des fonds propres.

⇒ Mais 20% des PME font face à des problèmes de fonds propres

Cette sous-population se décompose en PME présentant des capitaux propres négatifs (9%) et en PME présentant des capitaux propres positifs mais des taux d’endettement de plus de 200% de leurs capitaux propres.

 

1/3 des TPE se caractérise en 2018 par des structures financières très dégradées Elles sont particulièrement nombreuses dans l’immobilier (26%), les HCR (23%) et les services aux particuliers (23%) ; il s’agit souvent de jeunes entreprises.

Au total, en 2018, le montant de fonds propres négatifs des TPE s’élevait à 17Md€.
10% des TPE ont un taux d’endettement supérieur à 2014, même si depuis 2014, cette part a diminué de 13 à 10%. Cette part est de 15% dans les HCR et seulement de 4 à 6% dans les services aux entreprises.

 

La proportion de TPE surendettées décroît avec l’ancienneté : 14% des jeunes TPE, 9% des TPE entre six et dix ans d’ancienneté et 7% des TPE matures.

 

Les TPE connaissant une insuffisance de fonds propres sont les plus exposées à un risque de défaillance :  la présence de fonds propres négatifs multiplie par trois le risque de défaillance à un an, alors que le fait d’avoir des fonds propres élevés (supérieurs à 50% du bilan) diminue de 60% le risque de défaillance.

⇒ La situation avec la crise sanitaire

Pour limiter ces effets défavorables et les tensions de trésorerie, les pouvoirs publics ont mis en place des dispositifs financiers d’appui. Ces mesures ont permis à plus des 2/3 des entreprises ayant subi un choc de trésorerie négatif à l’occasion du confinement, de maintenir leur trésorerie à un niveau opérationnel.

 

Au terme de l’année 2020, les données publiées par la Banque de France sur l’impact de la crise sur la situation financière des entreprises montrent une double évolution :
-une augmentation de la dette brute des sociétés non financières de 217Md€ (soit + 12% par rapport à son encours de fin 2019), sous l’effet de la progression des crédits bancaires (+139Md€) et du dynamisme des émissions de titres de créances (+ 77Md€),
-une augmentation de leur trésorerie de 200Md€ (+ 29% par rapport à son encours de fin 2019), portée essentiellement par les dépôts à vue (+ 159Md€).

 

Au total, l’endettement financier net (dette brute – trésorerie) des sociétés non financières s’établit à 17Md€, bien inférieure, par exemple, à la hausse de la dette nette en 2019 (51Md€). 

 

Selon le baromètre trimestriel de Bpifrance Rexecode de février 2021 : 43% des dirigeants de TPE/PME font état d’un recul du niveau de leurs fonds propres depuis le début de la crise, 16% déclarant que leur niveau des fonds propres constitue une contrainte forte pour aborder la phase de reprise.

 

Toutefois, 55% des dirigeants de PME /TPE comptent investir en 2021, soit un niveau comparable à celui observé un an plus tôt.

 

Le besoin de renfort ciblé en fonds propres est estimé à 50Md€ dont environ 20Md€ avec un soutien public.
 

La réduction des fonds propres provient de l’utilisation de la trésorerie, pour faire face aux échéances, du recours à de l’endettement externe pour plus de 2 M€ en moyenne et qui inclut à la fois la dette privée et le report de charges fiscales et sociales et de la dégradation usuelle de l’actif existant.

⇒ Une solution parmi d’autres : l’intervention de Bpifrance et les prêts d’honneur

Bpifrance investit en fonds propres dans les TPE/PME/ETI françaises de façon directe (fonds de capital investissement gérés par Bpifrance) ou indirecte via des souscriptions dans des fonds de capital investissement français, aux côtés d’investisseurs privés (activité de fonds de fonds).

Les investissements en matière de capital innovation représentent 3Md€ d’actifs sous gestion en 2019 pour environ 200 participations, le capital développement et transmission direct 9Md€ pour plus de 600 participations.

 

♦ Avec Initiative France :18 000 projets financés ayant contribué à la consolidation ou à la création de 50 000 emplois. Ces prêts d’honneur facilitent l’accès à des financements bancaires avec un effet de levier moyen de 8 ; ainsi en 2019, les 208M de prêts d’honneur ont permis d’obtenir 1,6Md€ de prêts bancaires. Ils sont complétés par un accompagnement qui conduit à un taux de pérennité à trois ans de 92%.

Une enquête menée par le réseau à la sortie du premier confinement (10 000 entreprises répondantes) a mis en exergue l’importance de la constitution de fonds propres comme facteur de résistance à la crise et a révélé une fragilisation plus marquée pour les entreprises de moins de 18 mois d’existence et une confiance plus grande pour les entreprises ayant 2 à 3 ans d’existence.

 

Globalement, 31% des projets ont un plan de financement inférieur à 45 000€, 45% se situent entre 45 000 et 155 000€, et 24% au-delà.
Le plan de financement moyen (118 000€) repose sur 24% d’apport personnel, 8% de prêt d’honneur et 68% de prêt bancaire. Le plan de financement d’une entreprise en reprise (167 500€) est près de deux fois plus élevé qu’en création (91 000€), ce montant se situant à près de 120 000€ pour les entreprises en croissance.

 

♦ France Active a accompagné et financé en 2020, près de 30 000 entreprises, dont la croissance d’entreprises en ESS pour 410M€ mobilisés. Cela a permis la création ou la consolidation de 58 000 emplois.100M€ ont été consacrés en 2020 au Pacte Relance. 
Au-delà de cette offre conjoncturelle, France Active poursuit son soutien en fonds propres et quasi fonds-propres via France Active Investissement, pour répondre au respect du juste équilibre entre le souci de concilier la performance sociale et l’utilité sociale des entreprises investies. Depuis deux ans, plus de 10M€ ont été investis en fonds propres et 47M€ en quasi-fonds propres, en particulier des entreprises de l’ESS. France Active travaille actuellement à renforcer son action en quasi fonds-propres avec des prêts participatifs à maturité plus longue. 

⇒ Une brève comparaison avec l’Allemagne et l’Italie

Les fonds propres des entreprises françaises se situent à des niveaux comparables à ceux de ses deux grands voisins de l’UE, l’Allemagne et l’Italie : rapportés au total du bilan, les fonds propres étaient de 33% en France en 2017, contre 34 % en Allemagne et en Italie. Le constat est similaire sur les seules PME, avec un ratio de 36% en France, un peu inférieur à l’Allemagne (39%) mais un peu supérieur à l’Italie (32%).

 

Pour en savoir davantage : cp_ofe_fonds_propres_0.pdf (banque-france.fr)