Quel bilan pour les emplois d’avenir ?


"Quel bilan dresser des emplois d’avenir ?" Dares Analyses N°37, juillet 2021

Méthodologie : enquête auprès de jeunes de 18 à 30 ans ayant été en contact avec un conseiller d’une mission locale entre juin 2013 et février 2014. Une partie d’entre eux est entrée en emploi d’avenir entre octobre 2013 et mars 2014 et une autre n’a pas bénéficié de ce dispositif. L’enquête s’est déroulée en 5 vagues d’interrogations annuelles.
L’enquête a été réalisée par téléphone après envoi d’une lettre ou d’un e-mail pour la première interrogation et d’un e-mail ou d’un SMS pour les vagues de ré-interrogation.

L’échantillon initial comporte 44 700 individus, divisé à parts égales entre témoins et bénéficiaires. Le taux de réponse a baissé graduellement à chaque vague d’interrogation. Il était de 70% à la première vague et de 39% à la dernière vague. Les données ont été pondérées.

La population comparée aux bénéficiaires est constituée de faux-jumeaux construits à partir de la population des témoins en comparant leurs trajectoires professionnelles respectives.

 

Une étude qui permet une vision claire sur l’apport de cette mesure qui a disparu.

⇒ Ce que sont les emplois d’avenir

Dispositif en vigueur entre fin 2012 et début 2018, les emplois d’avenir bénéficient aux jeunes qui rencontrent des difficultés d’emploi du fait de leur faible niveau de diplôme ou de leur lieu d’habitation (en zone urbaine sensible, en zone de revitalisation rurale ou dans les DROM).

Le dispositif s’adressait principalement aux employeurs du secteur non marchand (71%, dont 34% des associations), mais, par dérogation, certains employeurs du secteur marchand pouvaient y recourir (29%), en majorité des petites entreprises (63% moins de 50 salariés). Les employeurs du secteur non marchand percevaient une aide de l’État à hauteur de 75% du Smic et de 35% pour les employeurs du secteur marchand.

Les emplois d’avenir ciblaient les activités présentant un caractère d’utilité sociale ; les 2 familles de métiers les plus exercées pendant l’emploi d’avenir étaient les services à la personne (24%) et l’hôtellerie-restauration (20%).

 

À compter du 1er janvier 2018, le recours aux emplois d’avenir n’est plus autorisé. Fin 2020, il ne reste plus de bénéficiaire d’un emploi d’avenir. En 2019, 420 contrats avaient été signés, il s’agissait pour l’essentiel d’avenants de reconduction du secteur non marchand. Le nombre moyen de jeunes en emploi d’avenir en 2019 s’élevait à 14 000 (10 700 dans le secteur non marchand et 3 300 dans le secteur marchand). En 2018, 1 000 contrats avaient été signés. Le nombre moyen de jeune en emploi d’avenir en 2018 s’élevait à 40 100 (29 500 dans le secteur non marchand et 10 600 dans le secteur marchand).

⇒ Qui étaient les bénéficiaires ?

80% ont un diplôme inférieur ou égal au CAP-BEP (39% sans diplôme, 41% CAP-BEP) et 35% habitent dans des zones défavorisées. 62% détiennent le permis de conduire.

Les jeunes signant un contrat dans le cadre d’un emploi d’avenir sont quasiment tous majeurs. Le contrat de travail peut être un CDD (d’un an ou 3 ans) ou un CDI.

⇒ Quel encadrement pour les jeunes ?

85% des jeunes bénéficient d’un suivi au sein de l’entreprise ; le tuteur au sein de la structure employeuse est chargé d’accueillir le jeune, de l’informer et de le guider au quotidien ; 85% des jeunes déclarent en bénéficier : 26% des jeunes déclarent avoir un suivi très régulier (plusieurs fois par mois), 13% une fois par mois, 15% une fois par trimestre, 32% moins d’une fois par trimestre, et 15% jamais.

 

69% bénéficient d’un suivi par la mission locale ; les conseillers de mission locale sont amenés à se déplacer régulièrement sur le lieu de travail des jeunes bénéficiaires, pour sécuriser la relation entre l’employeur et le salarié, encadrer l’obligation de formation et de préparer à la sortie du dispositif ; au cours de leur emploi d’avenir, 52% des jeunes se sont sentis aidés par la mission locale, mais plus d’un jeune sur deux déclarent que la mission locale ne l’a pas préparé à la sortie de l’emploi.

⇒ Les apports de ce contrat

51% sont en emploi 6 mois après la fin de leur contrat, 24% ayant signé un CDD et 22% un CDI. Ce taux d’emploi augmente progressivement par la suite : il atteint 57%, 12 mois après la fin du contrat puis 60% au bout de 18 mois (les jeunes sont alors davantage en CDI, 27% qu’en CDD, 24 %).

 

27% restent chez le même employeur après la fin de l’emploi d’avenir (30%, dans le secteur non marchand et 22% dans le marchand). Ceux qui ont signé sous la forme d’un CDD de 3 ans restent davantage chez leur employeur que ceux ayant eu un CDI (30 contre 23%), le CDI semblant alors avoir servi de tremplin pour trouver un emploi dans une autre entreprise.

 

82% des bénéficiaires accèdent à au moins une formation (moins pour les CDI, 67%) ; pour 59% d’entre eux, elle est certifiante (moins pour les CDI, 44%). Moins les jeunes sont diplômés, plus l’impact de l’emploi d’avenir est fort.

Idem pour les jeunes qui sont restés au moins trois ans au travail (+10 points 4 ans après l’entrée en emploi d’avenir, contre +5 points pour ceux qui ont interrompu leur emploi durant la 1ére année).

 

Les emplois d’avenir ont également un impact positif et significatif sur la santé des jeunes et sur leur autonomie (vivre dans un logement autonome).

Par ailleurs plus globalement, pour 40% cela a permis d’acquérir des compétences, pour 36% se réinsérer dans l’emploi, pour 14% améliorer sa situation financière, alors que cela n’a servi à rien pour 11%.

⇒ La durée effective du contrat et les cessations

La durée réelle moyenne d’un contrat s’établit à 2 ans ; 44% des contrats prennent fin avant leur terme. 1/4 des contrats durent moins d’un an, 19% de 1 à 2 ans, 24% de 2 à moins de 3 ans et 1/3 trois ans ou plus.

 

Le jeune ou l’employeur peut rompre le contrat à chaque date anniversaire pourvu qu’il prévienne l’autre partie au minimum deux semaines auparavant ; les ruptures sont 2 fois plus fréquentes dans le secteur marchand (62% des contrats) que dans le secteur non marchand (35%) ; si un contrat est renouvelé, il est peu souvent rompu.

 

Les ruptures sont répandues parmi les bénéficiaires les plus jeunes (47% pour les 17-20 ans, contre 40% chez les 25 ans et plus) et les moins diplômés (46% pour les sans diplôme, contre 38% chez les jeunes ayant au moins le baccalauréat) ; elles sont également plus fréquentes pour les contrats courts (signés pour un an, 49%) que pour les parcours longs en emploi d’avenir (contrats signés pour 3 ans ou pour un an et renouvelés ensuite, 43%).

Les jeunes invoquent plus souvent un mauvais environnement de travail ou des difficultés à se soumettre aux contraintes liées au poste ; ceux qui rompent plus tard invoquent davantage des problèmes personnels ou le fait d’avoir trouvé un emploi non aidé ou une formation.

 

38% des contrats durent effectivement trois ans ou plus dans le secteur non marchand contre 22% des contrats du secteur marchand.

⇒ Une comparaison avec les “faux jumeaux”

55% des bénéficiaires d’un emploi d’avenir sont en emploi contre 53% des faux-jumeaux. 4 ans environ après l’entrée en emploi d’avenir, 62% des bénéficiaires d’un emploi d’avenir sont en emploi contre 54% des faux jumeaux.

⇒ En conclusion

4 ans après l’entrée en dispositif, 62% sont en emploi ; Ils n’auraient été que 54% si ce dispositif n’avait pas existé.

Les bénéficiaires ayant au plus le CAP-BEP ont moins de chances de retrouver un emploi que ceux de niveau baccalauréat, l’effet du diplôme sur les chances d’être en emploi semblant augmenter avec le temps. Le dispositif est aussi moins efficace pour les jeunes habitant en zones défavorisées, qui sont pourtant le cœur de cible des emplois d’avenir. De même, le parcours en emploi d’avenir semble réussir davantage aux plus jeunes. Les hommes ont également plus de chance de retrouver un emploi à la sortie du dispositif que les femmes. 

 

Une durée longue en emploi d’avenir induit plus de chances de retrouver un emploi par la suite (65%), mais la durée plus longue en emploi d’avenir ne compenserait pas un niveau de diplôme initialement faible.

Ceux qui ont bénéficié d’une formation certifiante trouvent plus facilement un emploi (59%) et ceux ayant obtenu un diplôme à la suite de cette formation plus souvent encore (68%).

 

Les résultats sont modestes quant on les compare à ceux des faux jumeaux. Qu’a apporté ce dispositif à un employeur, hors celui qui a repéré un jeune motivé, mais dont l’accès à l’emploi lui est  difficile faute d’une formation qualifiante et certifiante ?

 

Pour en savoir davantage : Quel bilan dresser des emplois d’avenir ? (travail-emploi.gouv.fr)