La crise sanitaire semble avoir peu changé les pratiques de formation en entreprise.


"Crise sanitaire et formation professionnelle : le temps libéré ne suffit pas pour se former", CEREQ, bref N°420, mars 2022

Méthodologie : l’enquête Impact (Impact de la crise sanitaire sur les Mobilités, les Projets, les Aspirations professionnelles, les Compétences et le Travail) a été réalisée entre mars et mai 2021. Elle a pris appui sur le dispositif d’enquêtes couplées Entreprise – Salariés Défis, consacré aux formations et itinéraires des salariés, conduit par le Céreq en 5 vagues d’interrogations (de 2015 à 2019). La période couverte par l’enquête s’étend de mars 2020 à mars-mai 2021.
Un volet qualitatif a permis de réaliser des entretiens semi-directifs auprès d’une vingtaine de personnes ayant répondu à la dernière vague de Défis fin 2019. S’intéressant plus particulièrement aux effets de la crise sur les projets et aspirations professionnels, notamment des salariés moins qualifiés, le volet qualitatif a également mis au jour les effets de la crise sanitaire sur le travail et les apprentissages, la formation professionnelle durant le confinement, la mobilisation et l’apport des différents dispositifs publics.

 

Toutefois une minorité de salarié en situation plutôt difficile ont saisi l’opportunité de formation.

 

Plus de 40% des salariés déclarent avoir suivi ou entamé une formation entre mars 2020 et mai 2021, tous types de formations confondus (y compris les VAE et les bilans de compétences), un taux d’accès proche de celui de la période en 2018-2019.

⇒ L’accès à la formation reste inégal selon les caractéristiques de l’emploi des salariés :

♦ La moitié des cadres contre 1/3 seulement des ouvriers ont déclaré avoir suivi au moins une formation, alors que pour les professions intermédiaires et les employés, les taux d’accès sont proches.

 

♦ Plus de la moitié de celles suivies par les ouvriers sont règlementaires ou « obligatoires » : formations hygiène et sécurité, Caces et autres permis, habilitations, formations aux normes etc., alors qu’elles représentent à peine un tiers des formations suivies par l’ensemble des salariés ; moins de 10% des formations suivies par les ouvriers sont en lien avec le numérique, contre 29% de celles suivies par les cadres.

 

♦ Les salariés des grandes entreprises et ceux en CDI à temps plein ont été plus nombreux à se former que ceux en CDD ou à temps partiel ; les femmes ont été plus nombreuses à suivre des formations et pour des durées plus longues que les hommes (sauf celles ayant des enfants en bas âge) ; ainsi 14% des formations suivies par les femmes en 2020 l’ont été lors du 1er confinement, contre 21% pour les hommes.

 

♦ c’est aussi le cas de 20% des diplômés de niveau bac+5, contre 12% des titulaires au plus d’un bac. 

⇒ formation à distance ou en présentiel ?

♦ Plus de 60% des formés durant la période déclarent l’avoir été au moins une fois à distance (45% l’ont été exclusivement à distance) ; l’offre en distanciel a profité aux plus qualifiés et aux télétravailleurs (la moitié de ces formations ont été suivies par les cadres, tandis que plus de la moitié des formations en présentiel l’ont été par les employés et ouvriers;, notamment en situation de travail).

 

♦ La quasi-totalité des ouvriers et plus de 70% des employés ont rarement accédé à la formation à distance (14% contre 40% des télétravailleurs).

⇒ Pourquoi la formation et proposée par qui ?

♦ c’est le contexte productif de l’entreprise qui explique le recours à la formation, y compris en temps de crise, notamment l’introduction d’un nouveau produit ou d’un nouvel outil numérique.

 

♦ Au-delà de l’intention de se former, l’accès effectif à la formation est fortement lié au fait d’avoir reçu une proposition de formation de la part de l’employeur : près de 41% déclarent avoir reçu au moins une proposition de formation, dont 1/3 au moins une venant de l’employeur et 13% d’organismes de formation ou de son réseau professionnel.

 

♦ Les formations venant des employeurs s’adressent aux catégories les plus qualifiées (42% des cadres et 38% des professions intermédiaires contre 25% des employés et 27% des ouvriers).

A contrario, les salariés sans diplôme ont été les plus nombreux à déclarer n’avoir reçu aucune proposition de formation de la part de leur employeur (76% contre 67en moyenne), de même que les salariés en contrat à durée déterminée ou à temps partiel (respectivement 76 et 85%).

 

Les formations venant de réseau professionnel ou d’organisme de formation (en moyenne 13%) touchent à quasi égalité les cadres, professions intermédiaires et employés (14-15%), moins les ouvriers (8%).

⇒ Le recours au chômage partiel ne semble pas avoir transformé les pratiques des entreprises, mais quelque peu celle des salariés.

♦ Les entreprises jusque-là non formatrices ne semblent pas avoir particulièrement saisi le dispositif de chômage partiel à des fins de formation : la mise en regard de 2 populations comparables, l’une ayant connu le chômage partiel, l’autre pas, n’a pas permis de mettre en évidence un impact positif de la mesure du chômage partiel sur les propositions et l’accès à la formation, et ce quelle que soit la catégorie des salariés.

 

♦ Pour 16% des salariés (plus souvent les employés) ayant fait une demande de formation ou ayant suivi des formations à leur propre initiative, c’était en lien avec la crise. Mais celle-ci a aussi empêché les projets de formation de près d’1/3 tiers des salariés. Les employés, catégorie plus féminisée, évoquent plus souvent les contraintes personnelles (13% contre 8 en moyenne), les cadres avancent plus souvent un emploi du temps trop chargé (44% contre 26).

 

♦ 1/3 des formations suivies par les salariés relèvent de leurs demandes. Ces formations visaient plus souvent un changement de métier ou d’emploi (respectivement 39 et 51% contre 16 et 17% en moyenne), alors que pour l’ensemble des formations suivies, les objectifs concernaient plutôt l’efficacité au travail (72%), l’accompagnement ou la préparation d’un changement dans l’activité (respectivement 47 et 44%) et la prise de responsabilités (32%).

⇒ Les salariés entrés en formation pour la 1ére fois.

♦ Près d’1/4 des salariés non formés entre 2014 et 2020 ont suivi au moins une formation, entamé une VAE ou un bilan de compétences entre mars 2020 et mai 2021 ; ce sont plutôt des salariés à temps partiel, ceux des petites entreprises (moins de 10 salariés).

Parmi les salariés formés pour la première fois depuis 2014, 11% déclarent avoir entamé une VAE (contre seulement 4% des salariés formés au moins une fois depuis 2014), et 9% un bilan de compétences (soit un peu plus que les salariés déjà formés auparavant, 7%).

 

♦ Ils sont plus nombreux à considérer que l’offre de formation s’est élargie (32% contre 14 pour l’ensemble), qu’ils ont eu plus de temps disponible pour se former (36% contre 23), que les occasions de s’informer sur la formation ont été plus fréquentes (20% contre 9) ; ils sont plus nombreux à avoir été en contact avec un conseiller en évolution professionnelle (24% contre 7).

 

Pour en savoir davantage : Crise sanitaire et formation professionnelle : le temps libéré ne suffit pas pour se former | Cereq