Quid des entreprises zombies ?


"Entreprises zombies : les identifier, les compter, les analyser, les orienter", Revue Banque N°851-852, janvier 2021

La proportion des entreprises en difficultés (zombies), est selon différentes approches de l’ordre de 10-15%.

 

Une acception courante désigne comme « zombies » les entreprises dont l’endettement est tel qu’elles feraient faillite si les taux d’intérêt étaient normaux. Pour l’OCDE, il s’agit « des entreprises dont le revenu opérationnel est insuffisant pour couvrir leur charge d’intérêts pendant trois années consécutives »

 

Ces approches s’appuient donc largement sur l’endettement, son coût et la capacité d’une entreprise à assurer le service de sa dette jusqu’à son terme.

Toutefois, la fragilité des entreprises ne se limite pas à la seule dette, et prend aussi source dans de multiples « pathologies » potentielles : un BFR trop élevé et le risque de dépréciation qu’il porte, des charges fixes très importantes fort préjudiciables en cas de dépression d’activité, une faible capacité de négociation avec les clients et fournisseurs se traduisant par une rentabilité insuffisante. Cette problématique multifactorielle justifie de caractériser et identifier les zombies par leur notation.

⇒ 2 types de notation sont proposés

♦ La Banque de France revendique une cotation d’environ 240 000 à 260 000 entreprises selon les années. Il s’agit des entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 000€. Si l’on pose un chiffre arrondi de 1 600 000 sociétés de capitaux, cela représente environ 15-16% du parc global. Le seuil minimum acté par la Banque de France a été progressivement assoupli sous la pression des crises : avant 2008, il fallait être coté au minimum 3 pour « être bien vu par son banquier » (un peu plus de 20% des sociétés) ; en 2020, la barrière a été abaissée à 4.

 

En 2020, 23% des sociétés seraient performantes (cotations 3 à 3++), 62% fragiles (cotations 4 à 5+), 15% en difficulté (cotations 5 à 9), où l’on trouve les zombies. Selon la conjoncture, ces évaluations ont bougé, notamment pour les fragiles.

 

♦ PREFACE-NOTA-PME :

Partenaire depuis une vingtaine d’années de la base de bilans DIANE, et plus récemment d’Infogreffe, cette structure recense toutes les entreprises ayant publié leurs comptes et calcule une cotation par algorithmes. Le référentiel annuel est composé d’environ 1 000 000 sociétés jusque vers 2014, puis a progressivement diminué à quelque 600 000 sociétés en 2018, du fait de la possibilité donnée aux TPE et PME de demander la confidentialité totale ou partielle des comptes déposés au greffe du tribunal de commerce. Le système de notation de NOTA PME diffère de celui de la Banque de France sous plusieurs aspects : c’est une note qui se veut aisément lisible par tous, s’échelonnant de 0 à 10 (10 étant le meilleur) ; c’est une note continue, évitant les effets de seuil pouvant être difficiles à franchir pour satisfaire à certaines exigences de financement ; cette note s’alimente d’un panier de plusieurs dizaines de ratios et d’indicateurs, contre une dizaine environ pour la Banque de France.

Les performantes sont 50%, les fragiles 30% et celles en difficulté 20%.

 

Le grand mouvement qui apparaît clairement est une amélioration générale des notes visant à la concentration sur la tranche de notes 4,5- 7/10 : le poids de la tranche 7-10/10 a progressivement perdu environ 3% et la proportion des pré-zombies et zombies en dessous de 4/10 a été réduite de 9% ; entre ces extrêmes, la catégorie intermédiaire a vu sa représentation monter de 12%. On observe donc une sortie de crise progressive, où les meilleures ont perdu en performance, mais où les zombies ont vu leur situation s’améliorer.

 

⇒ Naturellement, ces statistiques éclairent « le monde d’avant ». Que va-t-il advenir de ces entreprises zombies dans le contexte de la crise de la Covid-19 ?

Sans doute, les sorties de route seront-elles nombreuses. Mais le pire n’est jamais certain. Paradoxalement, cette période présente de réelles opportunités et facilitations pour rebondir à la suite de cette période de résilience rendue possible par les diverses perfusions mises en place fort opportunément par les Pouvoirs publics : chômage partiel, PGE, etc.

 

D’autres dispositions, plus discrètes, sont consacrées à la prévention des difficultés, notamment 2 mesures : dans le cadre d’une sauvegarde, un nouveau « privilège de post-money » protégeant dans une certaine mesure des apporteurs de fonds en phase de préparation et de négociation d’un plan de redressement et la possibilité pour le chef d’entreprise de reprendre son entreprise « à la barre », une fois allégée d’une partie de sa dette restructurée. Il faudra naturellement construire un plan stratégique de retournement crédible et un accompagnement adapté aux entreprises qui le méritent.

 

Pour en savoir davantage : Entreprises zombies : les identifier, les compter, les analyser, les orienter – Revue Banque (revue-banque.fr)

Site Nota-PME : Qui est NOTA-PME ?

 

En complément, un article des Échos du 14 juin reprend une analyse de la Banque de France, où cette dernière évalue à un peu plus de 6 % les sociétés qui, fragilisées par la crise sanitaire, pourraient être en difficulté avec l’arrêt des dispositifs d’accompagnement. Ce taux dépasse 10% pour les secteurs de l’hébergement et de la restauration, et les arts et les spectacles.

 

La Banque de France a pris le pouls de 205.392 sociétés en passant au peigne fin leur bilan et leur compte de résultat arrêtés entre le 30 juin 2020 (3 mois après le premier confinement) et janvier 2021 ; l’analyse montre que 14% des entreprises ont subi à la fois une hausse de leur endettement et une baisse de leur trésorerie ; pour cette analyse, la Banque de France a écarté les sociétés qui étaient soit déjà en difficulté avant la crise du Covid, soit avaient abordé la pandémie avec une situation financière très solide leur permettant d’absorber le choc (un peu plus de 7% de l’échantillon).

 

Pour 73% des entreprises étudiées, la trésorerie est stable ou en hausse. Le dispositif des PGE y contribue nettement : 27% des entreprises étudiées y ont recours. Ces entreprises sont à la fois proportionnellement plus nombreuses à afficher une trésorerie stable ou en augmentation (plus de 89%) et connaissent une progression de leur trésorerie plus importante que celles qui n’ont pas utilisé ce dispositif.

Au final, très peu d’entreprises présentent un bilan réellement inquiétant.

 

Lire billet_219_vf.pdf (banque-france.fr)