La moitié des salariés sont privilégiés pour suivre des formations; ils sont les plus “utiles” à l’entreprise.


"La formation en entreprise accompagne les promotions mais fait défaut aux plus fragiles" , Cereq Bref N°374, lu avril 2019

Méthodologie : Initié par le Conseil national d’évaluations de la formation professionnelle (CNEFP) et financé par France Compétences, le Dispositif d’enquêtes sur les formations et itinéraires des salariés (Defis) est réalisé par le Céreq. Il associe le suivi d’une cohorte de salariés sur 5 ans et l’interrogation des entreprises qui les employaient en 2013. L’échantillon est représentatif de l’ensemble des salariés qui travaillaient en décembre 2013 dans les entreprises du secteur marchand (hors agriculture) de dix salariés et plus en France métropolitaine.

L’étude porte sur 4 750 salariés interrogés lors des trois premières vagues de l’enquête (en 2015, 2016 et 2017), présents dans l’entreprise en 2013 et toujours dans l’entreprise fin 2017 (6 sur 10).

La typologie des parcours a été élaborée via une méthode usuelle de Classification Ascendante Hiérarchique à partir d’indicateurs des quatre dimensions d’analyse.

 

L’étude fait apparaitre 5 parcours d’accès à la formation dont 2 sont privilégiés.

 

Les salariés concernés sont plus souvent des hommes, plus âgés et avec plus d’ancienneté que ceux qui l’ont quittée.

Un tiers d’entre a connu au moins un changement de fonction et plus d’un sur cinq au moins un changement de poste, alors que 15% ont changé d’unité ou d’établissement. Globalement, ils déclarent plus souvent des évolutions positives en matière de salaire, de responsabilité ou d’autonomie. Mais si les conditions de travail se sont améliorées pour un salarié sur cinq, un sur trois déclare au contraire une dégradation.

 

Cinq types de parcours sont observés : deux types de parcours ascendants, un descendant et deux autres caractérisés par une absence de changement. Ces parcours reflètent pour partie le cycle de la vie professionnelle : la promotion intervient le plus souvent en début ou en milieu de carrière, la stabilité plutôt en deuxième partie.

 

⇒ 2 types de parcours ascendant (52% des répondants)

Ils apparaissent étroitement liés à des changements organisationnels ou technologiques dans l’entreprise et se traduisent par des hausses cumulées de salaire, de responsabilité, d’autonomie ou encore d’intérêt du travail. 2 types de parcours se distinguent :

 

* le premier, qualifié de promotion fonctionnelle (28% des enquêtés), regroupe les salariés qui ont tous connu un changement soit de fonction, soit de poste, ou, moins souvent, d’établissement; plus jeunes (la moitié avait moins de 40 ans en 2013), ils se distinguent se distingue par un niveau de diplôme et de qualification particulièrement élevé; ce sont pour 53% des employés de grandes entreprises (500 salariés et plus); ils occupent fréquemment des postes de cadre et exercent des fonctions de supervision. Plus de 80% ont accédé à une formation dans le cadre du travail entre 2014 et 2017. Ce sont eux qui, à profils de salariés et caractéristiques d’entreprises équivalents, ont le plus de chances d’être formés par leur entreprise.

 

*Le second type (24%) renvoie à une promotion non formalisée; il concerne des salariés ayant également déclaré des évolutions positives sur plusieurs registres, sans avoir changé de fonction, de poste, d’établissement ou d’unité. Plus âgés que les salariés ayant connu une promotion fonctionnelle, moins diplômés, ils travaillent majoritairement dans des petites et moyennes entreprises, dans lesquelles prédominent la polyvalence, et dont l’organisation présente moins d’opportunités de mobilité interne que celle des plus grandes. La promotion semble intervenir dans une logique de valorisation ou de fidélisation des salariés. 70% accèdent à la formation, moins souvent que les précédents.

⇒ La carrière établie (28%)

On note une absence de changements professionnels et peu d’évolutions, à la baisse comme à la hausse. Cette stabilité va de pair avec l’expression par les salariés d’une satisfaction particulièrement élevée dans leur emploi, correspondant à leur qualification et à leurs compétences, permettant par ailleurs de concilier vie privée et vie professionnelle.

Cette catégorie concerne les salariés les plus âgés et regroupe relativement peu de salariés diplômés à bac+5 ou exerçant une fonction d’encadrement. En revanche, les contrats à temps partiel y sont davantage présents. Les salariés ont plus de chances d’être dans ce type de situation lorsqu’ils travaillent dans une petite entreprise.

Ces salariés à la carrière établie expriment moins souvent que les autres le souhait de se former : 57% contre 68 en moyenne. Ils cherchent moins que les autres à faire évoluer leur travail, prendre davantage de responsabilité ou changer de métier. « faire carrière » n’a pas nécessairement de sens.

S’ils accèdent moins que les salariés promus à la formation dans le cadre du travail, c’est néanmoins le cas d’une majorité d’entre eux (59 %). Quant aux salariés non formés, ils déclarent nettement moins souvent que les autres un manque de formation (27 % contre 43 % de tous les non-formés).

⇒ Le parcours professionnel bloqué (12%)

Une situation qui va de pair avec une faible satisfaction dans l’emploi et une perception très défavorable des conditions de travail : Huit sur dix ont déclaré un travail pénible ou répétitif et un travail insuffisamment rémunéré. Les emplois sont peu qualifiés (les ouvriers et employés de commerce constituant plus de la moitié des effectifs) et les personnes les moins diplômées.

La part des salariés déclarant un problème de santé ou de handicap les empêchant d’effectuer certaines tâches au travail y est plus élevée qu’en moyenne. Les risques de connaître un parcours bloqué augmentent fortement dans les entreprises frappées par un plan de licenciement, alors qu’ils diminuent lorsque des pratiques favorables à la formation ou au dialogue social sont implantées dans l’entreprise.

Moins de la moitié ont accédé à une formation, et seulement un tiers en excluant les formations règlementaires. Une majorité déclare en ressentir le manque (60% contre 43 en moyenne). Ils sont aussi particulièrement nombreux à souhaiter changer de métier ou trouver un autre emploi. Plus que pour d’autres salariés, se pose la question de l’accès à la formation qualifiante pour ces personnes bloquées dans leurs parcours professionnels.

⇒ Le parcours heurté (8%)

Un dernier type de parcours renvoie à des situations de fragilisation de salariés plus qualifiés, souvent en lien avec des changements organisationnels ou technologiques survenus dans leur entreprise. Qualifié de parcours heurté, il concerne les salariés ayant connu plusieurs évolutions professionnelles descendantes. Ici, près de huit salariés sur dix ont déclaré des baisses d’autonomie, d’intérêt ou une dégradation des conditions de travail, mais les baisses de responsabilité et de salaire y sont aussi beaucoup plus fréquentes. Près de neuf salariés sur dix ont connu au moins trois types d’évolutions négatives, souvent associées à un changement de poste, de fonction ou d’établissement.

 

On y trouve plus de seniors, de femmes et une part relativement plus importante de professions intermédiaires, d’employés administratifs, mais aussi de cadres. Plus de la moitié des salariés au parcours heurté est diplômée de l’enseignement supérieur, avec toutefois une sous-représentation de diplômés à bac+5. Plus d’un tiers travaille au sein de très grandes entreprises (contre un quart pour l’ensemble). Toutefois, au-delà de la taille, certaines transformations au sein des entreprises telles qu’une restructuration, un plan de licenciement ou d’autres changements organisationnels ou techniques, accroissent le risque de connaître ce type de parcours.

Exprimant le plus souvent le souhait de se former (77% contre 68 en moyenne), ces salariés se trouvent réduits à suivre des formations d’adaptation au poste; seuls 25% ont accédé à une formation correspondant à leur souhait de progression.

On observe pour ces salariés une moindre participation aux entretiens professionnels portant sur les perspectives de carrière et de formation.
En 2017, la plupart des salariés aux parcours fragilisés déclarent ne pas connaître le dispositif du CEP créé en 2014; parmi les salariés bloqués dans leur évolution professionnelle, seul un sur cinq dit en être informé.

 

Un tableau pour synthétiser ces 5 parcours :

 

Pour en savoir plus : http://www.cereq.fr/publications/Cereq-Bref/La-formation-en-entreprise-accompagne-les-promotions-mais-fait-defaut-aux-plus-fragiles