4 types de salariés se différencient selon leur autonomie dans l’organisation de leur travail, mais aussi selon l’emprise de ce travail sur leur vie privée.


"Un tiers des salariés ont peu d’autonomie dans leurs horaires et une vie privée exposée aux aléas professionnels", Insee Première N°1878, novembre 2021

Sources : l’enquête Emploi menée en continu sur l’ensemble des semaines de l’année, en France hors Mayotte, auprès des personnes de 15 ans ou plus vivant en logement ordinaire (c’est-à-dire hors foyers, hôpitaux, prisons, etc.). L’étude ici se restreint aux seuls salariés, soit environ 28 000 personnes interrogées.

Les groupes de salariés sont constitués sur la base d’une classification ascendante hiérarchique qui permet de regrouper les individus qui se ressemblent le plus sur les cinq indicateurs étudiés. Seuls les enquêtés ayant répondu aux 5 questions, soit 96% des salariés, sont retenus pour cette classification.

 

Une certaine autonomie dans l’organisation de son travail se “paie” par une intrusion plus marquée dans le vie privée et inversement.

 

L’autonomie dans l’organisation des journées de travail des salariés peut être approchée par différents indicateurs :

-39% des salariés déclarent qu’ils ont pu en 2019 décider de l’horaire de début ou de fin de leur journée de travail,

-45% peuvent prendre un ou deux jours de congés sans anticipation,

-61% peuvent interrompre leur travail pendant une ou deux heures pour une raison personnelle.

⇒ Autonomie et caractéristique des personnes au travail

-1/3 des salariés ont peu d’autonomie dans leurs horaires et une vie privée exposée aux aléas professionnels : 49% sont parfois amenés à modifier leurs horaires pour répondre aux exigences de leur travail ; 30% ont été contactés sur leur temps libre pour des raisons professionnelles au cours des 2 derniers mois.

 

-Les cadres peuvent plus souvent décider du début ou de la fin de leur journée de travail (77%, contre 24 pour les employés et 20 pour les ouvriers), poser un ou deux jours de congés sans anticipation (60%, contre 37 et 42) ou encore interrompre leur travail pour une raison personnelle (77%, contre 53 et 56).

A contrario, 71% des cadres doivent parfois modifier leurs horaires pour répondre aux exigences de leur travail (vs 40% des employés et 37 des ouvriers) ; 47% ont été contactés sur leur temps libre pour des raisons professionnelles (vs 25 et 19).

 

-Les femmes et les immigrés disposent en général de moins de latitude que les autres salariés dans l’organisation de leur temps de travail, mais leur vie privée est moins exposée à des imprévus professionnels.

 

-Comparés aux autres classes d’âges, les salariés de 55 ans ou plus disposent de plus d’autonomie dans l’organisation de leur temps de travail et ont une vie privée moins exposée à des imprévus professionnels. Ces différences selon le sexe, l’origine ou l’âge s’expliquent en partie par les caractéristiques des emplois occupés, mais pas uniquement. Lorsque l’on tient compte de la catégorie socioprofessionnelle agrégée, des différences persistent ; par exemple, parmi les salariés cadres, 72% des femmes peuvent décider de leurs horaires de travail, contre 81% des hommes.

⇒ 4 groupes d’emplois quant à l’autonomie des salariés dans l’organisation de leur temps de travail et à l’exposition de leur vie privée aux imprévus professionnels

♦ 23% des salariés ont des horaires non flexibles et une vie privée peu exposée aux imprévus professionnels.

-Ils bénéficient tout de même d’une certaine marge de manœuvre dans l’organisation de leur temps de travail : 58% peuvent prendre un ou deux jours de congés sans anticipation et tous peuvent interrompre leur travail en cas d’imprévu personnel.

 

-Leur vie privée est peu exposée à des imprévus professionnels : ils ne sont jamais contactés sur leur temps libre ; seuls 1/3 sont parfois contraints de modifier leurs horaires pour répondre aux exigences de leur travail.

 

-Les salariés de ce groupe sont plus souvent ouvriers (35%, contre 22 pour l’ensemble des salariés), notamment qualifiés ; à l’inverse, les cadres y sont largement sous-représentés (5%).

 

-Les métiers surreprésentés sont plus particulièrement ceux d’agent de service de la fonction publique, d’ouvrier qualifié du bâtiment, d’ouvrier non qualifié de la manutention, de magasinier qualifié ou encore de vendeur spécialisé.

Ces métiers s’exercent peu face à du public ou à des clients ; les salariés peuvent être facilement remplacés par un collègue en cas de besoin. Il s’agit plus souvent d’emplois aux horaires réguliers ; dans ces emplois, la quasi-totalité des tâches ne peuvent être réalisées que sur le lieu de travail.

 

♦ 34% des salariés ne peuvent pas modifier leurs horaires et leur vie privée peut être exposée à des aléas professionnels.

 

-Seuls 9% peuvent décider de leurs horaires de début ou de fin de travail, 10% peuvent poser un ou deux jours de congés sans anticipation, et aucun ne peut interrompre son travail pour raison personnelle.

 

-Face aux imprévus professionnels, 38% doivent parfois modifier leurs horaires (49% en moyenne) et 28% ont été contactés sur leur temps libre (30% en moyenne).
Ils ont plus souvent des horaires de travail atypiques : ils travaillent plus souvent le samedi (43% contre 34) ou le dimanche (25% contre 18), la nuit (13% contre 9), ou le soir (27%, contre 23) ; Ils ont également moins souvent des horaires semblables d’une semaine sur l’autre.

 

-Ils occupent plus souvent un poste d’employé (39% vs 30), en particulier non qualifié (20% contre 15).

 

-Ils travaillent Plus fréquemment dans la fonction publique hospitalière où ils sont aides-soignants ou infirmiers et d’État (professeurs des écoles) ; les conducteurs routiers et les serveurs, commis de restaurant, aides et apprentis de cuisine ou employés de l’hôtellerie y sont aussi surreprésentés.

 

-Les salariés en CDD, intérim ou apprentissage y sont aussi plus nombreux qu’en moyenne (19%, contre 15).

 

-Ce groupe compte plus de femmes (56% contre 50) et d’immigrés (13% contre 10).

 

♦ 43% des salariés ont une large autonomie pour organiser leur temps de travail, mais 22% sont assez impactée dans leur vie privée (groupe C), alors que 21% le sont grandement (groupe D).

 
-La totalité des salariés du groupe C et 69% de ceux du groupe D peuvent décider du début ou de la fin de leur journée de travail ; la majorité (respectivement 76% et 61) peuvent prendre de courts congés sans anticipation et l’immense majorité (95% et 86) peuvent interrompre leur travail pendant une heure ou deux pour raison personnelle.

 

-La totalité des salariés du groupe D ont été contactés pour leur travail sur leur temps libre (contre aucun des salariés du groupe C) ; 78% sont amenés à modifier leurs horaires pour répondre aux exigences de leur travail (contre 59 % pour le groupe C).

 

Dans ces 2 groupes, le volume horaire de travail est habituellement important, mais la charge de travail est encore plus élevée dans le groupe D (47% travaillent au moins 40 heures par semaine, contre 35% dans le groupe C et 29% pour l’ensemble des salariés).

Les salariés du groupe D se singularisent également par le fait qu’ils sont plus souvent amenés à travailler le soir et le week-end, et, de façon liée, à leur domicile.

 

-Au sein de ces 2 groupes, les cadres sont largement surreprésentés (38% pour le groupe D et 33 pour le groupe C, contre 19 parmi l’ensemble des salariés) ; les professions intermédiaires le sont également (31% dans ces 2 groupes, contre 27 dans l’ensemble).

Ce qui distingue ces 2 groupes c’est l’exercice de fonctions d’encadrement (35% dans le groupe D vs 23 dans le groupe C).

 

-Les professions de ces 2 groupes sont en grande partie les mêmes : ingénieurs et cadres techniques de l’informatique et des télécoms, cadres techniques et commerciaux de la banque, de l’assurance, des organismes de sécurité sociale et de l’immobilier, cadres commerciaux, ou encore cadres administratifs de la fonction publique.

 

-Le groupe D est, de l’ensemble des quatre groupes, celui où la part de femmes est la plus faible (42%).

 

Un tableau résumé :

⇒ Une comparaison avec les pays de l’UE 28

La France se situe globalement un peu au-dessus de la moyenne UE28, mais loin derrière la Suède où l’autonomie est bien plus grande, mais aussi où les exigences professionnelles impactent davantage la vie privée de leurs salariés.

La France est assez proche de l’Allemagne, sauf pour la nécessité de modifier son temps de travail du fait d’imprévus.

Par contre la France comme la plupart des “vieux” pays de l’UE est fort éloignée de la Pologne et de la Bulgarie, où l’autonomie est plus faible et l’intrusion professionnelle sur la vie privée plus habituelle.

 

Pour en savoir davantage : Un tiers des salariés ont peu d’autonomie dans leurs horaires et une vie privée exposée aux aléas professionnels – Insee Première – 1878