Si le nombre des non-salariés a augmenté en 2020, leur revenu a chuté.


"En 2020, les revenus d’activité des non-salariés chutent", Insee Première N°1926, octobre 2022

Le revenu d’activité est la rémunération issue de l’activité non salariée (hors aides versées par les pouvoirs publics au titre de la crise sanitaire), déduction faite des cotisations sociales payées dans l’année mais pas des contributions sociales (CSG non déductible, CRDS). Il est calculé à partir du revenu professionnel imposable auquel sont réintégrés certains allègements fiscaux et cotisations sociales facultatives : chiffre d’affaires des micro‑entrepreneurs après abattement pour frais professionnels, bénéfice net des entrepreneurs individuels classiques, rémunération des gérants majoritaires (incluant une partie des dividendes). En cas d’exercice déficitaire, le revenu des  entrepreneurs individuels des secteurs non agricoles est considéré comme nul.
Les non-salariés classiques ne déclarant pas leur revenu sont taxés d’office par la Caisse nationale de l’Urssaf pour le recouvrement des cotisations ; ils sont pris en compte dans les effectifs, mais pas dans les indicateurs de revenus.

 

L’année 2020 est une année atypique pour observer les revenus des non-salariés, du fait de la crise sanitaire ; son observation permet toutefois de prendre connaissance des écarts de revenus selon les activités et l’ancienneté des entreprises.

⇒ Le nombre de non-salariés

Fin 2020, 3,6 millions de personnes (dont 0,4 million dans le secteur agricole) exercent une activité non salariée, en tant qu’entrepreneurs individuels ou gérants majoritaires de sociétés (entreprises dites classiques dans cette note d’analyse) ou en tant que micro‑entrepreneurs. Ces 3,2  millions de non-salariés se concentrent, hors agriculture,  dans les services aux entreprises ou aux particuliers (45%), la santé (16%), le commerce (16%) et la construction (12%). La répartition diffère si l’on n’observe que les entreprises classiques : dans les services aux entreprises et aux personnes (38%), la santé (24,5%), le commerce (18%) et la construction (13%).

 

Hors secteur agricole, leur nombre augmente de 4% en 2020, après 6,4% en 2019, et 3,7% en 2018 et + 0,6% par an en moyenne entre 2013 et 2017 du fait des microentrepreneurs. Le nombre de micro‑entrepreneurs économiquement actifs (1,4  million en 2020) croît fortement en 2020 (+ 10,2%, après + 18,1% en 2019), alors que le nombre des créations classiques (1,8 million fin 2020), dont 52% d’entrepreneurs individuels et 48% de gérants majoritaires,  chute de 5,1%. Le nombre des entreprises classiques baisse dans la plupart des secteurs, plus particulièrement dans le commerce (-1,4%), les services aux particuliers (-1,2%) et la construction (-0,5%) ; il augmente dans les activités financières et d’assurance (+3,6%), les professions paramédicales (+2,8%) et les activités immobilières (+2,5%).

 

Le nombre de micro‑entrepreneurs augmente dans presque tous les secteurs en 2020, notamment dans la livraison à domicile (+60%), la vente à distance (+31%), les agences immobilières (+23%) et les services de nettoyage (+22%).

⇒ Les revenus d’activité sont très dispersés parmi les non‑salariés classiques

♦ En 2020, hors secteur agricole, ils retirent de leur activité en moyenne 3 620€ par mois et en revenu médian 2 240€ (dans la mesure du possible, j’utiliserais cette dernière donnée, plus juste pour rendre compte de la dispersion des revenus) ; ces montants intègrent ceux ayant des revenus nuls, hors cotisations sociales mais ne prennent pas en compte les aides gouvernementales.

Parmi eux, 12% déclarent un revenu d’activité nul (ou déficitaire), variant de moins de 2,6% pour les professionnels de santé à 25,7% pour les taxis et VTC, 27% les activités immobilières, 28,9% dans les arts, spectacles et activités récréatives.

 

Les activités artistiques et récréatives génèrent les revenus les plus faibles (510€ mensuels), le commerce d détail hors magasin (520€), devant les taxis et voitures de transport avec chauffeur (VTC), l’enseignement (940€), les autres services aux particuliers (1 020€),  la coiffure et les soins de beauté (1 150€) . A l’inverse, les médecins et dentistes perçoivent les revenus les plus élevés (7 070€), devant les pharmaciens (5 090€), les juristes et comptables (4 550€).

 

♦ Les micro‑entrepreneurs retirent en moyenne 550€ par mois. Un micro-entrepreneur sur quatre gagne moins de 80€ par mois, la moitié moins de 280€ et un sur dix plus de 1 430€. 28% cumulent cette activité avec un travail salarié, contre 9% des non‑salariés classiques. Le revenu d’activité global de ces micro‑entrepreneurs pluriactifs (incluant leurs salaires) atteint 2 160€  mensuels dont seuls 330€ proviennent de leur activité non salariée.
Les micro‑entrepreneurs n’exerçant pas d’activité salariée perçoivent en moyenne 630€ par mois.

 

La dispersion des revenus mesurée par le coefficient revenu moyen/revenu médian montre des écarts fort importants pour certaines activités : activités artistiques (coefficient de 2,7) et commerce de détail hors magasin (2,6), alors que les coefficients les plus habituels oscillent entre 1,4 et 1,7; certaines activités ont peu d’écart comme les professions paramédicales (1,1), la coiffure (1,2), la construction (1,2).

⇒ Ces revenus se replient fortement en 2020 : ils diminuent de 5,8% en euros constants, en 2020.

20% (y compris ceux n’ayant pas dégagé de revenu) gagnent moins de 490€ mensuels (2éme décile), en diminution de 34% en un an (750€) ; le revenu médian (2 240€) diminue de 8% et  le 9éme décile (8 130€) de seulement 3%.

 

Les baisses les plus fortes figurent parmi les secteurs ayant subi une fermeture obligatoire liée à la crise sanitaire ou dont l’activité a été la plus directement affectée par les restrictions pendant les périodes de confinement : -31,6% pour les taxis, -17,8% dans les arts et spectacles, -15,6% dans l’hébergement‑restauration et -13,8% pour la coiffure et soins de beauté.

 

Par ailleurs, le nombre de non‑salariés classiques ayant déclaré un revenu nul est élevé dans les activités artistiques (29%), les activités immobilières (27%), les taxis (26%), ce qui fait largement chuter les revenus moyens ou médians ; cette part est très faible dans la santé (2,6%), les activités juridiques et comptables (5%)

 

Le nombre de déclaration de revenu nul bondit de 65%. La part des taxis déclarant un revenu nul est notamment multipliée par cinq en un an. Dans les métiers de la santé, l’évolution est contrastée : par exemple, les revenus des professionnels de la rééducation (kinésithérapeutes principalement) baissent de 15,5%, tandis que ceux des infirmiers et sages‑femmes augmentent de 5,5%.

 

un tableau récapitulatif :

⇒ Quelques autres caractéristiques des entrepreneurs classiques : les femmes, l’ancienneté des entreprises, leur localisation en région.

39% des non‑salariés sont des femmes ;  les non‑salariées classiques gagnent en moyenne 20% de moins que leurs confrères en 2020 (3 130€ par mois en moyenne, contre 3 910) ; elles sont de plus en plus nombreuses dans les secteurs les plus rémunérateurs (professions du droit, pharmaciens, médecins). Une partie de l’écart s’expliquerait par un volume de travail moins important ; elles sont aussi plus jeunes et dirigent des entreprises en moyenne plus petites.

 

♦ Plus le dirigeant est ancien en tant que chef de son entreprise, plus le revenu moyen est élevè et plus le nombre de déclaration de revenu nul diminue. Noter que la moitié des dirigeant ont au moins 10 ans d’exercice.

♦ Les revenus des chefs d’entreprise selon leur localisation : le revenu moyen de 3 260€ est proche dans la quasi totalité des régions .

Il est plus élevé dans le nord de la France, notamment en Ile-de-France, Hauts de France et Grand Est ; il baisse légèrement en passant du centre au sud. Il est le plus faible en Martinique et Guadeloupe.

 

Pour en savoir davantage : En 2020, les revenus d’activité des non-salariés chutent – Insee Première – 1926