424 400 travailleurs frontaliers en France, dont 42% dans le Grand Est.


"Le travail frontalier dans le Grand Est : en 2018, 182 000 habitants de la région travaillent dans un pays voisin", Insee analyses Grand Est N°144, mai 2022

Quelles spécificités ont les travailleurs frontaliers du Grand Est et de ceux de Savoie impliqués en Suisse ?

⇒ La répartition des travailleurs étrangers frontaliers Français

En 2018, 424 400 actifs traversent une frontière pour travailler dans l’un des 8 pays limitrophes (1,6% des actifs occupés). Depuis quelques décennies, le travail frontalier prend de plus en plus d’ampleur ; en Europe, la France est le pays qui compte le plus de travailleurs frontaliers.

 

183 000 résidents du Grand Est travaillent à l’étranger. Parmi eux, presque la moitié a un emploi au Luxembourg, un sur quatre exerce en Allemagne, un sur cinq en Suisse, et moins de 5% en Belgique.

Auvergne-Rhône-Alpes compte quant à elle 127 000 actifs travaillant à l’étranger (essentiellement en Suisse), soit 29% de l’ensemble des travailleurs frontaliers de France.

Suivent ensuite les régions Bourgogne-Franche-Comté, Hauts-de-France et Provence-Alpes- Côte d’Azur, avec chacune entre 32 000 et 38 000 actifs frontaliers, travaillant pour la plupart en Suisse, en Belgique et à Monaco.

⇒ Les pays où ils travaillent et leurs secteurs d’activité dans le Grand Est

Le Luxembourg est le pays qui accueille le plus grand nombre de travailleurs frontaliers (17% d’entre eux) et celui qui a connu le plus fort développement (+140% entre 1999 et 2018 vs en moyenne +39%), devant l’Allemagne (26%, en baisse depuis 1999, en légère) hausse depuis 2013), et la Suisse (22%, plutôt en hausse), loin devant la Belgique (4,6%).

♦ L’industrie est le secteur qui emploie le plus de travailleurs frontaliers : 26% (10 points de plus que parmi les actifs qui travaillent en France). Les secteurs du commerce, des transports, des HCR regroupent un quart des travailleurs frontaliers, suivis des services aux entreprises (15%).

 

Le poids de l’industrie est particulièrement fort en Allemagne et en Suisse (43% et 35%), mais concerne différents types de productions : côté allemand, il s’agit notamment de l’industrie automobile et côté suisse, de l’industrie pharmaceutique. Au Luxembourg, plus de 10 000 frontaliers travaillent dans les activités financières et d’assurance (12% des actifs venant du Grand Est).

⇒ Les caractéristiques de ces travailleurs du Grand Est

♦ Depuis 2008, les ouvriers sont toutefois de moins en moins nombreux, en particulier les ouvriers non qualifiés, les processus de production industriels étant de plus en plus automatisés, alors que le nombre d’employés non qualifiés est en hausse.
Les professions intermédiaires couvrent un quart des effectifs ; les cadres ne représentent que 6% des frontaliers travaillant en Belgique, tandis qu’au Luxembourg et en Suisse, cette part atteint respectivement 16 et 20%.

♦ Ces frontaliers sont majoritairement des hommes, seuls 38% sont des femmes (mais 46% en Belgique), 7 frontaliers sur 10 vivent en couple, et pour les 3/4 de ces couples, un seul des conjoints travaille à l’étranger.

Ces frontaliers ont entre 35 et 54 ans (58%, pour 51% des non-frontaliers) ; la moyenne d’âge s’élève à 42 ans.

 

♦ Leur niveau de diplôme est proche des actifs occupés de la région ; toutefois, l’Allemagne fait le plus appel au niveau CAP, voire en-deça (56% vs 42 en moyenne), alors que le Luxembourg est le pays qui sollicite le plus de diplômés de bac +3 et au-delà (45% vs 38)

En 2018, 492 communes comprennent au moins 20% de frontaliers parmi leurs actifs occupés, contre 436 en 1999 ; le nombre de communes qui comptent plus de 20% de frontaliers travaillant au Luxembourg a plus que doublé en 19 ans, passant de 92 à 193. Il en est de même pour la zone d’attractivité de la Belgique, avec 32 communes en 1999 et 63 en 2018. Concernant la Suisse, malgré une croissance continue du nombre de frontaliers, sa zone d’influence est restée très stable entre 1999 et 2018 (111 puis 112 communes). La zone d’attractivité de l’Allemagne s’est réduite, passant de 176 communes en 1999 à 104 en 2018, avec toutefois une stabilisation depuis 2013.

 

Pour en savoir davantage : Le travail frontalier dans le Grand Est : en 2018, 182 000 habitants de la région travaillent dans un pays voisin – Insee Analyses Grand Est – 144

⇒ Le cas particuliers des frontaliers avec la Suisse

Les travailleurs frontaliers avec la Suisse sont 125 100, dont 6 sur 10 dans la commune de Genève ; le nombre de navettes domicile-travail entre la région et la Suisse augmente au rythme de 4,7% par an en moyenne depuis 1999.

En lien avec le rayonnement international de Genève, la part des personnes déclarant une autre nationalité que la nationalité française au sein des frontaliers est largement supérieure à celle des actifs occupés de la région (19% contre 6); parmi eux, 10 100 ressortissants suisses viennent trouver en France des conditions de logement plus favorables.

6 profils de navetteurs :

35 100 navetteurs (28% de leur totalité) sont en majorité des employés, peu diplômés, occupant par exemple des postes d’employé administratif d’entreprise. 76% travaillent dans la commune de Genève. 36% sont de nationalité étrangère (parmi eux, les Suisses devancent largement les Portugais et les Italiens). Ils sont les plus âgés (68% ont au moins 40 ans) ; 61% sont des femmes. 55% des conjoints de ceux qui sont en couple travaillent également en Suisse.

 

♦ 30 800  (25% des frontaliers) sont des ouvriers. Ils résident le plus loin de la frontière. 48% travaillent à Genève. 59% sont titulaires au plus d’un CAP, BEP ou équivalent (contre 36% des actifs occupés de la région). Ils exercent pour quasiment la moitié dans la construction ou l’industrie (incluant la haute horlogerie et la mécatronique) ; certains métiers ou compétences sont particulièrement recherchés ; ils sont plus qualifiés que l’ensemble des ouvriers en activité en Auvergne-Rhône-Alpes (75% contre 59).

 

♦ 26 000 frontaliers (21%) comptent surtout des professions intermédiaires. 80% sont des femmes ; une majorité a un diplôme de niveau bac+3 ou plus ; ils occupent le plus souvent une fonction présentielle (60% contre 40 pour l’ensemble des actifs occupés de la région). Ils travaillent, pour plus d’un sur deux, dans le secteur de l’administration publique, de l’enseignement, de la santé et de l’action sociale (près d’1/4 sont infirmiers et assimilés) ; près d’un sur deux est à temps partiel.

 

♦ Les cadres (22 400, 18% des navetteurs) constituent la CSP la plus surreprésentée par rapport à l’ensemble des actifs en emploi de la région (+ 7 points). Ingénieurs et cadres d’étude, en R&D et informatique. Ils travaillent pour plus d’un sur deux en dehors de la commune de Genève, et se rendent très souvent au travail en voiture (pour 84% d’entre eux). Ils sont surreprésentés dans le Grand Annecy (3 900 actifs).

 

♦ 6 000 sont aussi des cadres avec un haut niveau de diplôme ; 7 sur 10 indiquent une nationalité étrangère (85% sont européens, les Britanniques et les Italiens étant plus nombreux que les Suisses) ; certains sont des binationaux ayant également la nationalité Française. ils habitent souvent au plus près de la frontière ; la moitié des conjoints de ceux qui sont en couple travaillent également en Suisse.

 

  4 800 frontaliers (4%) sont des employés et des ouvriers très jeunes (86% ont moins de 25 ans) ; ils vivent chez leurs parents ou sont en colocation et sont peu diplômés ou en cours de formation (1/4 dont plus de la moitié comme apprentis). 43% sont en CDD et près d’1/3 à temps partiel. Ils exercent majoritairement dans les secteurs du commerce, les HCR et la réparation d’automobiles ; ces emplois assurent à ces jeunes un salaire intéressant par rapport à un emploi équivalent en France.

 

Pour en savoir davantage : Travailleurs frontaliers : six profils de « navetteurs » vers la Suisse – Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes – 145