Quelle situation en matière d’emploi entre 2019 et 2021 par territoires ?


"Géographie de la crise Premier trimestre 2021 : quelles dynamiques territoriales en matière d’emploi et de chômage ?", France Stratégie, Point de vue, juillet 2021

Près d’1/4 des zones d’emploi retrouvent leur niveau d’avant crise, tant en matière d’emploi que de demandeurs d’emploi, mais sont éclatées sur l’ensemble du territoire national.

⇒ Une approche qui pourrait apparaitre contradictoire

♦ Les 15 territoires les plus dynamiques en matière d’emploi entre 2016 et 2019 s’en sortent mieux au 1er trimestre 2021 ; ils retrouvent leur niveau du 1er trimestre 2019, au contraire des zones les moins dynamiques pré-crise qui pâtissent encore de leurs fragilités structurelles.

 

♦ Le constat est différent lorsqu’on se penche sur l’évolution des demandeurs d’emploi : les 15 territoires avec les taux de chômage les plus élevés en 2019 ont plus vite absorbé le choc d’avril 2020 et ont retrouvé dès le premier trimestre leur niveau de demandeurs d’emploi d’avant-crise. Cette embellie repose en partie sur une forte dynamique d’emploi (+ 3% de création d’emplois entre le 1er trimestre 2019 et le 1er trimestre 2021).

Les macro-zones traditionnelles de fort chômage, au nord et au sud de la France, voient ainsi leur situation s’améliorer au 1er trimestre 2021.

Par contre, les 15 zones d’emploi avec les taux de chômage les plus faibles en 2019 affichent une trajectoire plus modeste.

⇒ En définitive, 3 types de territoires

♦ Près d’1/4 des zones d’emploi retrouvent leur niveau d’avant crise, tant en matière d’emploi que de demandeurs d’emploi, mais sont éclatées sur l’ensemble du territoire national et ne recouvrent pas la carte classique de la performance territoriale.

En 2020, les 15 zones d’emploi les plus dynamiques avant la crise ont détruit près de 2 fois moins d’emplois que les 15 zones d’emploi les moins dynamiques, suggérant pour ces derniéres qu’une partie des pertes d’emploi de l’année 2020 provenait de facteurs structurels ; au 1er trimestre 2021, ces zones d’emploi en difficulté, n’ont pas retrouvé leur niveau d’emploi du 1er trimestre 2019, alors que les zones les plus dynamiques avant la crise l’ont déjà recouvré, et même dépassé de 0,5%.

Parmi les quinze zones d’emploi les plus dynamiques avant la crise figurent 5 grandes métropoles.

 

♦ À l’inverse, 30% des zones d’emploi sont confrontées à une double difficulté : on y retrouve en majorité celles qui ont le plus souffert de la crise en 2020 ainsi qu’une partie des territoires les plus fragiles structurellement (la moitié nord de la France notamment).

 

♦ Enfin, près d’un tiers des territoires combinent création d’emploi salarié et davantage de demandeurs d’emploi. Ce paradoxe apparent peut traduire le délai d’ajustement du marché du travail et l’attractivité démographique de ces zones, notamment en périphérie des grandes métropoles de l’Ouest et du Sud.

⇒ Quelques remarques transversales

♦ À l’Est et au Sud, les effets de la crise demeurent les plus forts :
Au premier trimestre 2021, comme en 2020, l’est et le sud de l’hexagone regroupent les zones d’emploi les plus fragilisées en matière d’emploi, notamment des zones touristiques et certaines zones industrielles. Les conséquences de la crise y restent fortes.

On y trouve : les Alpes, la Côte d’Azur et la Corse, en partie du fait des mesures de restrictions sanitaires affectant les secteurs associés au tourisme (hébergement-restauration, activités culturelles, transports, etc.), davantage présents sur ces territoires et la zone frontalière de la région Grand Est.

On y trouve encore la région francilienne : au 1er trimestre 2021, l’Île-de-France concentre la moitié de la baisse nationale de fréquentation hôtelière et enregistre la plus forte baisse par rapport à la même période en 2019 et 2018.

 

À l’inverse, la façade atlantique et le centre de la France continuent de se démarquer positivement ; dans ce groupe, on trouve également la Vallée de la Bresle (Seine-Maritime) et Oyonnax (Rhône-Alpes), alors qu’elles appartenaient aux 50 zones les plus touchées en 2020.

 

La diversité des situations au regard de la hausse ou de la baisse des demandeurs d’emploi :

Les destructions d’emploi entre les 1ers trimestres 2019 et 2021, ont été accompagnées à la fois par une hausse des demandeurs d’emploi (30% des zones), mais aussi par une baisse des demandeurs d’emploi dans un nombre proche de zones (32% des zones). De même les zones créatrices d’emploi ont connu une hausse des demandeurs d’emploi (32% des zones), alors que dans d’autres (24% des zones, les demandeurs d’emploi sont en baisse).

 

 

♦ La spécialisation économique : une composante importante toutefois insuffisante pour expliquer la variabilité du choc entre les territoires.
Au 1er trimestre 2021, les secteurs qui restent les plus affectés sont les mêmes qu’en 2020 (les HCR, les activités culturelles et de voyage ainsi que le transport aérien). Néanmoins, cette spécialisation économique n’épuise pas toutes les explications ; d’autres effets dits « locaux » (indépendants de la composition du tissu économique) restent majoritaires ; ils expliquent ainsi 2/3 de l’hétérogénéité entre zones d’emploi s’agissant du taux de recours apparent à l’activité partielle, et 90% s’agissant de la variation de l’emploi salarié privé.

 

♦ Les zones structurellement plus dynamiques s’en sortent mieux. Cette embellie repose en partie sur une forte dynamique d’emploi (+3% de création d’emplois entre le premier trimestre 2019 et le premier trimestre 2021).

 

♦ Les 12 grandes métropoles restent en difficulté au 1er trimestre 2021. L’emploi privé salarié y a résisté un peu mieux qu’à l’échelle nationale (-1,2% en 2020 par rapport à 2019, contre -1,5% pour la France), ce qui traduit une dynamique structurelle de l’emploi plus favorable (depuis plusieurs années avec des créations d’emplois), mais cependant une réduction de cette dynamique entre les 1ers trimestre 2019 et 2021. Mais par rapport à 2019, la part de demandeurs d’emploi a augmenté un peu plus fortement (de 1,3% en 2020 vs 1% à l’échelle nationale) et d’environ 1% sur les premiers mois de l’année 2021 (contre 0,5%).

Pour autant, on note une certaine hétérogénéité au sein des grandes métropoles : certaines comme Nice, Rouen et Paris ont été les plus durement touchées, notamment par l’arrêt des activités liées au tourisme, notamment à l’international et Toulouse du fait de l’aéronautique. Alors que 8 autres zones d’emploi des grandes métropoles ont recouvré leur niveau d’emploi du T1 2019.

 

Au final, la ligne de fracture traditionnelle Caen-Nice est en partie estompée. L’analyse synthétique des territoires y est difficile du fait d’une plus forte fragmentation que par le passé, due notamment aux activités empêchées par la crise sanitaire.

 

Pour en savoir davantage : Géographie de la crise – Premier trimestre 2021 : quelles dynamiques territoriales en matière d’emploi et de chômage ? | France Stratégie (strategie.gouv.fr)