Les effets du CICE sur l’emploi ne sont pas au rendez-vous


"Comité de suivi du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi Rapport 2017", France Stratégie, octobre 2017

Les entreprises relevant d’un régime réel d’imposition, quelle que soit leur activité, peuvent bénéficier du CICE, calculé sur les rémunérations qu’elles versent à leurs salariés. Ce crédit d’impôt, déterminé par année civile, est assis sur le montant brut des rémunérations ne dépassant pas 2,5 fois le Smic. Son taux est fixé à 7% pour les rémunérations versées depuis le 1er janvier 2017, mais 6% en 2018.

Créé en 2013, le CICE avait pour objectif de financer les efforts des entreprises en matière d’investissement, de recherche, de recrutement et de prospection de nouveaux marchés.

 

 

Au 5 août 2017, le montant de créance 2013 au titre de l’IS enregistrée dans les fichiers fiscaux s’élevait à 11,218Md€ pour 779 372 redevables et pour ceux au titre de l’impôt sur le revenu à 0,373Md€, concernent 274 983 redevables. Le montant total de la créance 2013 s’élève donc à 11,591Md€ pour plus 1 054 355 entreprises ou groupes fiscaux.

Au 5 août 2017, la quasi-totalité des entreprises ont déclaré leur créance fiscale 2014 avec 809 000 au titre de l’IS et 433 000 pour l’IR, soit une hausse de 18% des déclarants (+57% pour ceux à l’IR), pour une créance totale de 17,541Md€.

Au titre des salaires 2015 la créance s’élève à près de 17,887Md€ pour 1 266 344 entreprises, dont 825 622 dans le cadre de l’IS (une créance de 16,996Md€), et 440 722 dans le cadre de l’IR (une créance de 0,891Md€). Le nombre de demandeurs, notamment ceux de l’IR, est désormais stable.

Au titre des salaires 2016 la créance s’élève, au 5 août 2017, à 15,110 Md€ pour 979 399 entreprises, dont 14,234Md€ pour les redevables de l’IS (571 319 déclarations enregistrées) et 0,786Md€ pour ceux relevant de l’IR (408 080 déclarations enregistrées).

 

En ce qui concerne les entreprises à l’IS, les microentreprises sont pour les déclarations 2016, 78% des entreprises bénéficiaires et 11,2% des créances; les PME sont 21% des demandeurs et 32% des créances; les ETI sont 0,8% des demandeurs et 23% des créances et les grandes entreprises 33,6% des créances.

Les catégories d’entreprises les plus bénéficiaires sont ainsi les grandes entreprises et les PME avec les 2/3 des créances.

 

62,2Md€ de créances ont été déclarés par les entreprises redevables de l’IS et de l’IR depuis la mise en place du dispositif en 2013; 68 % (42,3Md) ont effectivement été versés aux entreprises sous forme d’imputations ou de restitutions immédiates.

 

La part de la masse salariale éligible au CICE décroît avec la taille des entreprises : la masse salariale éligible au CICE représente en moyenne 77 % de la masse salariale totale pour les très petites entreprises, contre 55 % pour celles de plus de 2 000 salariés. Cela s’explique naturellement par des salaires en moyenne plus faibles dans les TPE et PME que dans les ETI et grandes entreprises :

L’importance du CICE varie également selon le secteur d’activité; les secteurs qui bénéficient le plus de la réduction du coût du travail induite par le CICE sont l’hébergement et la restauration, les activités de services administratifs, les activités pour la santé humaine ou encore la construction (la part de la masse salariale éligible au CICE y est supérieure à 78%); par contre, la fabrication de produits informatiques, électroniques et optiques, les activités financières et d’assurance, ou encore celles de recherche et développement ont en moyenne moins de 40% de leur masse salariale totale éligible au CICE. 

 

Plus de 10,7Md€ de créances de CICE ont donné lieu à préfinancement depuis 2013, pour plus de 60 000 dossiers, toutes banques confondues (Bpifrance et autres banques commerciales). Considérant que les avances accordées par les banques représentent généralement 85% de la valeur estimée de ces créances, ce sont donc environ 9Md€ préfiancées, dont 7,5Md par BPI (54% pour les ETI). Les entreprises bénéficiaires d’un préfinancement en 2016 représentent environ 900 000 emplois (24% dans les TPE/PME et 61% dans les ETI).

 

Noter que Plus de 70% des bénéficiaires du préfinancement en 2016 ont un niveau de solvabilité faible (côte Banque de France entre 5+ et 9), en légère progression par rapport à 2014. Ces bénéficiaires concentrent 51% des montants de préfinancement en 2016, proportion stable par rapport à 2015 et en baisse par rapport à 2014. À titre de comparaison, les entreprises à faible solvabilité sont 41% en 2016 parmi l’ensemble des entreprises cotées par la Banque de France. 

Les entreprises bénéficiaires du préfinancement du CICE au premier semestre 2016 et cotées par la Banque de France, ont un taux de défaillance à 12 mois d’environ 4% (dont 1,47% de liquidations), en légère baisse par rapport à celles préfinancées en 2015 (plus de 4%).

 

Les effets positifs du CICE hors le rétablissement des marges

 

Le comité constate un effet positif mais modéré, concentré sur les entreprises les plus exposées, avec  de l’ordre de 100 000 emplois sauvegardés ou créés sur la période 2013-2015, et un volume plus faible pour les emplois sauvegardés grâce à l’effet du préfinancement (moins de 3 000 emplois sauvegardés, uniquement sur 2013).

 

Les effets sur les salaires demeurent difficiles à déceler. À la lumière des données de 2015, d’une part, le CICE aurait plutôt joué positivement sur les salaires des cadres et professions intellectuelles supérieures, d’autre part, la dynamique des salaires sur les trois premières années ne semble pas avoir été spécifiquement affectée par le seuil de 2,5 Smic à partir duquel un salarié ne bénéficie plus de la mesure.

 

Les travaux d’évaluation réalisés sur 2013 et 2014 montrent que le CICE est sans effet sur le volume d’exportations (des entreprises déjà exportatrices).

 

Aucune des deux équipes de recherche ne décèle d’effet significatif sur l’investissement et la R& D en 2013 et 2014. Cette absence d’effet à court terme n’est pas surprenante, si l’on considère que les décisions d’investissement présupposent l’accroissement effectif des marges et qu’elles peuvent nécessiter du temps pour être mises en œuvre.