La protection sociale des indépendants : les profils des bénéficiaires et l’état des lieux du RSI


« Rapport d´information fait au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale et de la commission des affaires sociales sur le régime social des indépendants », Senat N°597, juin 2014

 Les 2,5 millions d’affiliés au RSI forment une population très diverse :

 

Auto-

Entrepreneurs*

Entrepreneurs

individuels

Gérants

à l’IS

Micro-

entreprises

Gérants

à l’IR

Agent général

d’assurance

Total

Nombre en milliers

822

770

682

148

97

6

2 525

Répartition

33

30

27

6

4

0,2

100

* dont 525 000 auto-entrepreneurs ayant réalisé un chiffre d’affaires

 

Hors auto-entrepreneurs, le nombre de cotisants est stable autour de 1,4 million de cotisants, en légère diminution sur la période récente ; avec les auto-entrepreneurs (avec chiffre d’affaires positif), le nombre de cotisants est d’1,7 million, dont 300 000 professionnels libéraux.

 

Le revenu moyen des indépendants, hors auto-entrepreneurs, s’élève, d’après l’Insee, à 37 200€ pour l’année 2011, avec des écarts de revenus importants (un rapport interquartile de 5,2 contre 1,8 pour les salariés). Les cotisations sont les suivantes pour les entreprises « classiques » :

Cotisation

Assiette

Taux artisan

Taux commerçant

ou industriel

Taux profession

libérale

Maladie-maternité

Totalité du revenu professionnel

6,50

Indemnités journalières

Dans la limite de 5 PASS (187 740€)

0,70

 

Retraite de base

Sous plafond 37 548€

16,95*

CNAVPL

Au-delà du plafond

0,20

CNAVPL

Retraite complémentaire

Dans la limite de 37 513€

7

CNAVPL

Revenus compris entre 37 513 et 150 192€

8

CNAVPL

Invalidité-décès

Sous plafond

1,60

1,10

CNAVPL

Allocations familiales

Totalité du revenu professionnel

5,25

CSG-CRDS

Totalité du revenu professionnel+

cotisations sociales obligatoires

8

Formation professionnelle

Sur la base de 37 032€

0,29

0,25

0,25

* 17,05 en 2015 et 17,15 en 2016

 

Les cotisations des auto-entrepreneurs sont les suivantes :

Activité

Taux de cotisation

Assiette

Versement libératoire IR

Taux global

Achat/vente

14,1

Chiffre d’affaires

1

15,1

Prestations de services

24,6

Chiffre d’affaires

1,7 et 2,2 BNC

26,3 et 26,8

Prestations de services libérales

23,3*

Chiffre d’affaires

2,2

23,5

* 25,2 en 2015

 

Depuis 2001, les droits à prestations d’un indépendant sont les mêmes que ceux d’un travailleur salarié : pour la maladie, les prestations en nature sont identiques à celles du régime général, de même que pour le régime de retraite de base ; la branche famille est gérée, comme pour les salariés dans les mêmes conditions.

Lorsque l’auto-entreprenariat est l’activité principale de la personne, elle bénéficie de la même couverture sociale que les autres travailleurs indépendants.

En cas de poly-activité, l’auto-entrepreneur cotise au RSI au titre de son activité d’auto-entrepreneur mais reçoit des prestations au titre du régime auquel il est affilié pour son activité principale.

L’auto-entrepreneur acquiert des droits à retraite sous réserve d’atteindre des montants suffisants pour acquérir des trimestres (entre 11 430€ et 26 013€ de CA annuel pour quatre trimestres) ; entre 60 % et 80 % des AE ne valident aucun trimestre.

Les cotisations représentent environ 47% du revenu brut des indépendants, sachant que les risques « accidents du travail-maladies professionnelles » et « chômage » ne font pas l’objet d’un régime obligatoire pour les indépendants (écart minimal de 7,5 points avec le taux de prélèvement global des salariés) ; pour les professions libérales, il n’existe pas d’indemnités journalières, les prélèvements sont réduits d’autant.

 

Les régimes de base sont équilibrés par des ressources externes, alors que les régimes complémentaires d’assurance vieillesse ou d’invalidité-décès sont financés par des ressources propres, cotisations et produits financiers.

Le financement des régimes de base du RSI, dont les cotisations et les prestations ne dépendent pas des décisions du régime, fait largement appel, compte-tenu de la démographie des cotisants et de la distribution des revenus, à des ressources externes du fait d’un déficit structurel de l’ordre de 6 Md€ par an ; celles-ci sont principalement constituées de la compensation inter-régimes et de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), dont le recouvrement est assuré par le RSI.

En millions €

CSG (maladie)

CSSS*

Compensation généralisée

(vieillesse)

Cotisations sociales prises

en charge par l’Etat

Total

2013

3 438

2 189

1 690

203

7 520

Moyenne 2008-2013

3 184

3 001

1 345

184

7 714

Ecart 2013 à la moyenne

+8%

-27%

+26%

+10%

-2,5%

*Les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés sont assujetties au taux de 0,16% de leur chiffre d’affaires lorsque celui-ci dépasse 760 000€ sur l’année.

 

Le RSI sert chaque année 17Md€ de prestations maladie, d’indemnités journalières, de prestations invalidité et de retraite de base et complémentaire.

 

Le RSI est caractérisé par une rotation particulièrement rapide du fichier de ses cotisants : en 2012, il a enregistré quelque 565 000 affiliations et 475 000 radiations ; 1,8 million de personnes, radiées du régime, ont des droits ouverts (au moins un trimestre) au titre de la retraite.

 

Par ailleurs, la quasi-totalité des retraités indépendants a exercé une activité salariée au cours de sa carrière professionnelle ; un indépendant « classique » sur dix, un auto-entrepreneur sur trois cumule cette activité avec un travail salarié.

La durée moyenne d’assurance est relativement courte dans le régime des indépendants (14 ans pour les nouveaux retraités artisans, 11 ans pour les commerçants).

 

Le paiement des cotisations des travailleurs indépendants s’apparente à celle de l’imposition des revenus : les deux premières années du démarrage de l’activité, tant que les revenus ne sont pas connus, les cotisations provisionnelles sont calculées sur un revenu forfaitaire. Par la suite, les cotisants procèdent à une déclaration de leurs revenus, base du calcul des cotisations ; les cotisations dues au titre de l’année N, sont calculées, à titre provisionnel, en pourcentage du revenu d’activité

N-2 puis font l’objet d’une régularisation en fin d’année N+1, une fois connu le revenu de l’année N ; les cotisants peuvent demander un ajustement de leurs cotisations sur la base de l’estimation de leur revenu d’activité de l’année en cours.

 

Pour ouvrir leurs droits, les travailleurs indépendants doivent s’acquitter d’une cotisation minimale, équivalent de la durée d’affiliation pour l’ouverture de droits aux salariés ; le paiement de cette cotisation concerne plus de 30% des assurés du régime maladie.

Une exception : celle des auto-entrepreneurs auxquels s’applique un principe « pas de chiffre d’affaires, pas de cotisation ».

 

Lorsque le revenu du travailleur indépendant est négatif ou nul, la cotisation est de 30% de la cotisation minimale ; au-delà, la réduction décroît avec l’augmentation du revenu et s’annule à hauteur de 40% du plafond de la sécurité sociale. En 2014, la cotisation minimale maladie-maternité varie entre 659 et 976€.

En matière de retraite, la cotisation minimale ne permet de valider qu’un seul trimestre, même si l’activité a été exercée tout au long de l’année (un revenu équivalent à 600 Smic horaire brut est nécessaire à la validation d’une année complète).

En matière d’indemnités journalières, elle ouvre droit à un taux minimum.

 

Le fonds d’action sociale (112M€ de budget en 2013), est l’une des spécificités du RSI ; ses principaux axes sont l’aide à l’acquisition d’une complémentaire-santé, en complément du dispositif de base, l’aide aux cotisants en difficulté (délais de paiement et de prise en charge des cotisations) et les problématiques de maintien à domicile.  

En 2013, 320 000 délais de paiement ont été accordés, soit un décalage de trésorerie d’un montant de 1,7Md€ (10% des cotisations liquidées) ; l’aide aux cotisants en difficulté (prise en charge d’un trimestre de cotisations, renouvelable une fois), a concerné 15 500 bénéficiaires pour un montant moyen de plus de 1 900€.

Le montant des interventions du Fonds national d’action sociale (Fnas), au titre de l’aide aux cotisants en difficulté, représente près de 30M€, financés par 23M€ de cotisations aux régimes obligatoires des artisans et commerçants, 5M€ sur les cotisations aux régimes complémentaires, et 1,8M€ au titre du régime « maladie » des professions libérales.

 

La création du RSI par la fusion de la Caisse nationale d’assurance maladie des non-salariés (Canam), de la caisse autonome de compensation de l’assurance vieillesse artisanale (Cancava) et de la caisse de compensation de l’organisation autonome nationale de l’industrie et du commerce (Organic) a permis de diminuer le nombre d’interlocuteurs, le nombre de déclarations et d’appels de cotisations ; le nombre de caisses est passé de 90 à 30 ; le nombre des administrateurs a été divisé par trois. Ce premier aspect de la réforme n’a pas soulevé de difficultés.

Un interlocuteur social unique est crée (l’ISU) pour coordonner et gérer les actions des organismes concernés (RSI, URSSAF, CNAVPL, organismes conventionnés…) : le réseau des Urssaf, qui recouvrait déjà les cotisations « famille » ainsi que la CSG-CRDS des travailleurs indépendants (45% du total des cotisations des indépendants) se voyait confier le recouvrement de la totalité des cotisations des travailleurs indépendants ; le RSI n’avait en effet pas les moyens, en particulier les moyens informatiques, d’assurer lui-même le recouvrement des cotisations. L’affiliation, le recueil de la déclaration des revenus, le recouvrement amiable et forcé des cotisations continuent à être assurés par le RSI.

L’outil informatique censé la servir s’est révélé insuffisamment robuste. Une cellule spécifique avait été mise en place en 2011 par le RSI pour assurer le traitement des dossiers en liaison avec les experts comptables. Après avoir permis le règlement de quelque 4 000 dossiers, cette cellule a été dissoute en 2013, faute de dossiers en nombre significatif.

Au plus fort de la crise, les affiliés éprouvaient de grandes difficultés à joindre un interlocuteur au téléphone avec un taux de « décroché » de 50% ; le RSI a amélioré son accueil téléphonique portant ce taux à 79%, avec un objectif de 85%.

 

Pour le versement des prestations, le taux de traitement des indemnités journalières se fait dans des délais inférieurs à 15 jours ; celui des feuilles de soins électroniques dans un délai de 8 jours.

En matière de retraite, le taux de reprise des carrières depuis 2008, dont le chantier a abouti en février 2014, est opérationnel. Les indicateurs sont moins bons en ce qui concerne les délais de liquidation définitifs de retraite droits propres (52% en 2013 avec un objectif de 75%).

Au 31 décembre 2013, les restes à recouvrer cumulés (artisans commerçants) s’élevaient à 10,9Md€, taxations d’office comprise, ce qui représente les deux tiers d’une année d’émissions de cotisations.

 

Des services nouveaux ont été mis en place :

* Deux numéros de téléphone à quatre chiffres à disposition des affiliés, en fonction de la nature de leurs problèmes, selon qu’ils sont liés aux cotisations ou aux prestations.

* Le RSI a accentué la dématérialisation des procédures, 500 000 cotisants ayant ouvert un compte en ligne. Il est désormais possible de consulter son compte en ligne, de demander des délais de paiement ou encore de modifier la périodicité de ses versements ; pour les déclarants en ligne, il est possible de procéder à une régularisation anticipée des cotisations de l’année N-2 et de recevoir les attestations nécessaires pour répondre aux appels d’offres publics.

7 000 experts comptables ont un accès unifié à l’ensemble de leur portefeuille de clients.

 

Le rapport développe par ailleurs tout un nombre de préconisations.