3 profils de dirigeants de PME-ETI en ce qui concerne la gouvernance d’entreprise.


"La gouvernance des PME-ETI : levier de confiance et de performance" BpiFrance le Lab, lu mars 2020

Méthodologie; échantillon de 1 452 répondants 

Les répondants :

Âge moyen des répondants (53 ans); 89% d’hommes, 11% de femmes

25% sont les fondateurs de leur entreprise. Par ailleurs, 51% occupent leur poste de dirigeant depuis plus de 10 ans (dont 21% depuis plus de 20 ans);  90% ont pour titre «PDG », « président » ou « directeur général – gérant » (6% sont directeurs de succursales ou gérants franchisés, 4% sont directeurs financiers, chefs d’usine ou responsables d’agences).

41% n’ont pas cumulé d’expérience de plus de 10 ans dans d’autres entreprises.

72% estiment que leur entreprise a enregistré une surperformance sur les trois dernières années, en comparaison de ses concurrents du même secteur.

8% des PME-ETI de notre échantillon sont des filiales de grands groupes.

 

Les entreprises concernées :

47% ont de 10 à 49 salariés; 19% de 50 à 99 salariés; 18% de 100 à 249 salariés; 13% 250 salariés et plus. Les entreprises de 10 à 49 salariés sont largement sousreprésentées par rapport à leur poids dans la population mère (83%), alors que la large sur-représentation des entreprises de plus de 50 salariés peut expliquer en partie certains scores, excellents, observés chez l’ensemble des répondants interrogés sur les fondamentaux de leur gouvernance.

Les catégories d’activité sont : industrie (35%), services (24%), commerce (22%), BTP (10%), transports (6%), autres (3%). Les sociétés industrielles sont sur-représentées par rapport à leur poids dans la population mère (22%), alors qu’il y a sous-représentation des sociétés de services (24 vs 28%) et des sociétés commerciales (22vs 29%).

 

Si une bonne partie de l’étude concerne les “belles” intentions des dirigeants, les 3 profils observés sont beaucoup plus explicites de la réalité de la situation.

Approche du concept de gouvernance

* L’impact de l’actionnariat sur le système de gouvernance

Les dirigeants seuls actionnaires et les dirigeants actionnaires majoritaires  (44% chez les moins de 50 salariés, mais 32% chez les 250 salariés et plus) ont toute latitude pour formaliser à leur convenance leur système de gouvernance. Noter que 20% de dirigeants sont actionnaires minoritaires (17% chez les moins de 50 salariés et 29% chez les 250 salariés et plus); 28% ne sont pas actionnaires de leur entreprise.

* 70% des entreprises sont en SAS (66% des moins de 50 salariés et 74% les plus de 50); 14% sont en SARL (21 et 6%); sont en SA 11 et 18%. Le cadre légal des SAS et SARL offre une liberté d’organisation quasi-parfaite, notamment dans la mise en place d’organes de direction et de contrôle.

* La loi Pacte, promulguée en mai 2019, bouleverse le paysage juridique des PME-ETI : La modification du Code Civil consacre la notion d’intérêt social élargi; un statut optionnel de « société à mission » est introduit.

Une définition de la gouvernance

Pour Bpifrance, elle est un système visant à élaborer, valider et mettre en œuvre des décisions stratégiques, en s’appuyant sur un socle de valeurs, au service de la vision de l’entreprise. Ce système prend corps dans un ensemble de textes, de pratiques, de rituels, de procédures et d’instances, qui organisent entre autres la consultation de parties prenantes (actionnaires, collaborateurs, voire clients, fournisseurs…). La vision stratégique de l’entreprise constitue le cap à suivre pour formaliser et animer un système de gouvernance cohérent, mobilisateur et respectueux des intérêts des parties prenantes. La culture et les valeurs de l’entreprise servent de socle de référence à tout système de gouvernance et se matérialisent dans des comportements concrets au service des objectifs collectifs de l’entreprise (entraide, dialogues réguliers…).

 

84% (moins de 50 salariés) à 94% (250 salariés et plus) des dirigeants de PME-ETI manifestent un fort intérêt pour la gouvernance qu’ils perçoivent comme un levier pour la performance de leur entreprise.

 

5 piliers pour une gouvernance au service de la performance de l’entreprise à l’épreuve de la réalité des PME-ETI

 

1. Élaborer une vision du futur désirable de son entreprise et bâtir une stratégie adaptée.

L’agenda surchargé des dirigeants ne favorise pas leurs réflexions stratégiques : si 49% consacrent leur temps à la gestion du quotidien, 62% aimeraient y consacrer moins de temps; 32% le consacrent à la gestion des équipes et 19% à la réflexion stratégique; mais 70% ont pris conscience de cet enjeu et souhaiteraient consacrer plus de temps à l’exercice stratégique.

A la question “avez-vous mis en place un support formalisé et partagé résumant les orientations stratégiques de l’entreprise ? 39% des moins de 50 salariés, 57% des 50-249 salariés et 73% des 250 salariés et plus répondent oui. Par ailleurs 48 à 72% ont travaillé sur un socle de valeurs partagées.

 

2. Travailler sur soi pour « combler ses angles morts ».

La gouvernance a pour source un travail sur soi du dirigeant qui apprend à se connaître pour mieux combler ses angles morts.

50% des dirigeants ont suivi une formation ou assisté à des conférences ces 3 dernières années pour étoffer leurs qualifications; cette démarche sous-tend un travail sur soi pour identifier ses faiblesses, mais aussi une véritable volonté de les corriger, notamment en adoptant des outils de gestion formalisés (organigramme, fiches de poste, plan stratégique…), conduisant à faire participer leurs collaborateurs aux prises de décision.

71%, au moment de prendre des décisions stratégiques, ont fait des choix allant à l’encontre de leurs certitudes ou de leurs intuitions initiales.

La remise en question personnelle et la volonté de toujours s’améliorer semblent ainsi orienter vers une gouvernance plus élaborée.

 

3. Favoriser des prises de décision collégiales (notamment via des instances dédiées).

La collégialité peut prendre forme dans certaines instances classiques, ou se dessiner sous les traits d’un bras droit ou d’un associé à parts égales au capital. La collégialité peut aussi être synonyme d’une consultation d’avis élargie au sein de l’entreprise ou d’une inscription à une association de dirigeants pour s’aérer l’esprit et s’inspirer des meilleures pratiques de ses pairs. Dans les entreprises familiales, les conseils de famille peuvent aussi offrir un certain cadre dédié aux échanges. Enfin, la collégialité peut s’exprimer à toutes les strates de l’entreprise, notamment sous la forme de comités managériaux ou de comités de pilotage de projet (voire d’une simple boîte à idées…).

 

Les deux instances les plus notoires parmi les PME et les ETI sont le comité de direction et le conseil d’administration, pouvant accueillir des représentants d’actionnaires ou de collaborateurs mais aussi des administrateurs indépendants.

 

91% considèrent que la présence d’un comité de direction joue un rôle utile ou indispensable au développement de leurs activités, alors que seuls 66% ont mis en place une telle instance. Toutefois, plus ces entreprises grandissent, plus elles adoptent fréquemment cette instance (de 54 pour les moins de 50 salariés à 92% pour les plus de 250 salariés).

Parmi les sources de motivation ayant poussé ces dirigeants à mettre en place cet organe, la volonté de mieux organiser la réflexion et la prise de décision (70%), l’amélioration de la transversalité et du partage d’informations (56%) et la délégation de tâches pour autonomiser les équipes (37%).

À l’inverse, 70% des dirigeants n’ayant pas de codir estime que la taille de leur entreprise ne le requiert simplement pas, les échanges informels et les discussions sporadiques suffisent.

 

24% les moins de 50 salariés ont un conseil d’administration, 29% chez les 50-249 salariés et 48% chez les 250 salariés et plus. De fait, 35% jugent peu utile un CA et seulement 26% une structure indispensable.

 

Le portrait de l’administrateur idéal : il n’a pas à faire partie de la famille du dirigeant ou de son cercle de confiance. Il n’a pas non plus l’obligation de venir du même secteur d’activité que l’entreprise concernée. En revanche, il doit apporter son expertise sur certains enjeux clés de l’entreprise, bâtie à force d’expériences personnelles. Au niveau de la personnalité, l’administrateur doit être suffisamment volontaire pour ne pas se laisser impressionner par le dirigeant, tout en sachant quelle est sa place afin de ne pas tomber dans des considérations opérationnelles ou des combats d’ego.

 

92% estiment être entourés de personnes capables de les contredire dans leur société. Toutefois, les acteurs qu’ils jugent importants pour la prise de décision stratégique sont le dirigeant d’abord (98% dont 68 déterminant), les associés exécutifs (70 dont 29), les membres de l’équipe de direction (91% dont 23), les actionnaires et administrateurs (59% dont 27), les collaborateurs (75% dont 5), les conseils extérieurs (54 dont 7%).

Noter que 25% estiment être les seuls déterminants au moment de prendre les décisions stratégiques; les actionnaires majoritaires et les dirigeants en poste depuis plus de 10 ans sont sur-représentés.

 

4. Créer une culture de la délégation et fluidifier la circulation de l’information.

87% des interrogés trouvent que la circulation de l’information de la direction vers les salariés est satisfaisante ou très satisfaisante. En revanche, le constat diffère concernant les remontées d’informations en provenance du terrain et la communication entre les équipes.

Plus l’entreprise grandit, plus ce sentiment s’accroît; si 24% des dirigeants d’entreprise de moins de 50 salariés sont insatisfaits des remontrées d’informations dont ils disposent, ce sont 40% des dirigeants d’ETI. 

Pour y pallier, près de 9 dirigeants de PME-ETI sur 10 ont mis en place des réunions d’équipe régulières et des entretiens annuels d’évaluation. 53% organisent la formation de leurs collaborateurs récemment promus managers.

 

Pour expliquer leurs difficultés à bien faire appliquer leurs décisions, les dirigeants évoquent le manque de temps et de moyens (67%), le manque de relais managériaux (35%) et la mauvaise appropriation des équipes (24%).

 

5. Impliquer les collaborateurs et faire converger les intérêts des parties prenantes de l’entreprise.

58% estiment que l’entreprise appartient autant à ses actionnaires qu’à ses collaborateurs. Pour motiver les collaborateurs, 63% ont mis en place un mécanisme de redistribution des bénéfices vers les collaborateurs,  62% la co-construction de décisions opérationnelles entre collaborateurs et managers , 55% la participation des collaborateurs aux décisions stratégiques, 15% l’ouverture du capital à leurs collaborateurs.

En cas d’indisponibilité de longue durée du dirigeant, 28% des moins de 50 salariés estiment que l’entreprise est en danger, 17% pour les 50-250 salariés et 10% pour les 250 salariés et plus.

 

3 profils de dirigeants face au défi de la gouvernance : les empiriques, les attentistes, les précurseurs.

 

63% les « Empiriques » : ils n’ont pas nécessairement formalisé de plan stratégique mais disposent d’autres outils de partage d’informations. Dans leur majorité, ils ont formé un comité de direction. Toutefois, le dirigeant demeure de loin le plus déterminant au moment des prises de décisions. Les collaborateurs commencent à être sollicités lors des prises de décision opérationnelles.

 

91% élaborent un plan d’actions après avoir pris une décision stratégique (contre 63% des Attentistes et 100% des Précurseurs).

64% ont mis en place un mécanisme de redistribution des bénéfices vers leurs collaborateurs (contre 49% des Attentistes et 74% des Précurseurs)

54% estiment qu’une logique hiérarchique domine les rapports au sein de leur organisation (contre 41% des Précurseurs et 68% des Attentistes).

43% affirment que leurs instances de décision collégiales sont difficiles à animer sur la durée (contre 24% des Précurseurs et 53% des Attentistes).

26% estiment la présence d’un conseil d’administration indispensable à l’égard du développement de leurs activités (contre 42% des Précurseurs et 10% des Attentistes).

 

⇒ 20% des « Attentistes » : ils sont moins intéressés par le sujet de la gouvernance que les autres. Ils passent ainsi beaucoup de temps sur l’opérationnel, remettent moins en question leurs propres compétences et organisent peu de débats d’idées avant de prendre leurs décisions stratégiques. 

 

76% n’ont pas suivi de formation ces 3 dernières années pour étoffer leurs compétences (contre 27% des Précurseurs).
57% du temps est accordée à l’opérationnel (contre 42% pour les Précurseurs).
50% font reposer leurs décisions stratégiques plutôt sur leur intuition que sur l’analyse d’indicateurs clés (contre 27% des Précurseurs).
41% ont mis en place un comité de direction au sein de leur entreprise (contre 85% des Précurseurs).
31% font participer les collaborateurs de leur entreprise aux prises de décision opérationnelles (contre 91% des Précurseurs).

 

⇒ 17% des « Précurseurs » : ces dirigeants ont déjà défini les valeurs de l’entreprise et travaillé sur un plan stratégique. Ils considèrent la présence d’un codir et d’un conseil d’administration comme indispensable au développement de leurs activités. Ils cherchent constamment à interroger leurs intuitions personnelles, à organiser des débats d’idées pertinents et à impliquer leurs collaborateurs lors des prises de décision.

 

94% estiment qu’en cas de longue indisponibilité de leur part, leur entreprise pourrait continuer de générer de la croissance (contre 84% des Empiriques et 57% des Attentistes)

94% cherchent systématiquement à ouvrir un débat d’idées avant de prendre une décision stratégique (contre 75% des Empiriques et 44% des Attentistes).

94% évaluent via des indicateurs l’impact de leurs décisions stratégiques après les avoir entérinées (contre 65% des Empiriques et 35% des Attentistes).

92% ont défini les valeurs partagées de leur entreprise, au-delà de la croissance et de la rentabilité (contre 59% des Empiriques et 19% des Attentistes).

87% ont formalisé et partagé les orientations stratégiques de l’entreprise (contre 50% des Empiriques et 19% des Attentistes).

 

Plus les dirigeants sont actionnaires uniques ou majoritaires de leur entreprise et plus ils ont de chance d’adopter un comportement attentiste vis-à-vis de la gouvernance. De même, les entreprises où plusieurs membres d’une même famille détiennent des parts au capital, semblent avoir des pratiques de gouvernance moins optimisées que les autres.

Un auto diagnostic est ensuite proposé aux dirigeants, ainsi que les chantiers à mettre en œuvre pour chacun des 3 groupes.

 

Pour en savoir davantage : https://www.bpifrance-lelab.fr/Analyses-Reflexions/Les-Travaux-du-Lab/La-gouvernance-des-PME-et-ETI