Les ruptures conventionnelles (421 000 en 2017) profitent davantage aux cadres


"Quels salariés parviennent à négocier leur indemnité de rupture conventionnelle ?" Dares analyses N° 006, janvier 2018

Sources : formulaires CERFA de demande d’homologation reçus en 2015 et validés par l’administration.

Pour réaliser l’analyse, l’ensemble des ruptures conventionnelles sont divisées en 4 groupes de taille égale selon le salaire reçu par le bénéficiaire de la rupture; le dernier groupe (salaire supérieur à 2 520€ ; 25 % des ruptures) est divisé en 2 pour faire apparaître une catégorie de salaires très élevés (salaire supérieur à 4 500€ ; 5 % des ruptures).

L’indemnité reçue en mois de salaire peut dépendre de différentes caractéristiques individuelles : ancienneté, salaire, catégorie socioprofessionnelle, sexe, âge, ainsi que du fait d’être assisté ou non lors de l’entretien.

 

Les ruptures conventionnelles ont progressé de 17% entre 2015 et 2017; 6 facteurs sont favorables à une indemnité supérieure à l’indemnité légale.

 

En 2015, hors salariés protégés, 360 000 demandes de rupture conventionnelle ont été homologuées par l’administration (14% de l’ensemble des fins de CDI). Dans le même temps les ruptures des salariés protégés ont été peu nombreuses (de l’ordre de 7 000 en 2014).

En 2017, leur nombre est de l’ordre de 421 000 (+17%).

 

⇒ Les salariés ayant de fortes rémunérations obtiennent plus facilement des indemnités de rupture conventionnelle favorables : 

 

*pour les salaires bruts inférieurs à 2 520€ par mois (75% des salariés concernés), l’indemnité médiane reçue ne dépasse pas de plus de 5% l’indemnité légale.

*Dans la tranche de salaires compris entre 2 520 et 4 500€ brut (20% des salariés), l’écart entre l’indemnité médiane de rupture conventionnelle et l’indemnité légale de licenciement se situe aux alentours de 25% entre 3 et 10 années d’ancienneté. Ainsi, pour un salarié percevant une rémunération brute de 3 000€ avec 5 ans d’ancienneté, l’indemnité reçue sera dans la moitié des cas supérieure à 3 720€ brut, contre une indemnité légale de 3 000€

* Au-dessus de 4 500€ brut par mois (5%), l’indemnité de rupture conventionnelle médiane est supérieure de plus de 60% à l’indemnité légale, quelle que soit l’ancienneté du salarié. Ainsi, pour un salarié percevant 5 000€ brut par mois avec une ancienneté de 5 ans, l’indemnité reçue sera dans plus de la moitié des cas supérieure à 8 500€, contre une indemnité légale de 5 000€.

*L’écart entre indemnité reçue et indemnité légale est particulièrement important pour les 1% des salariés les mieux rémunérés (salaire supérieur à 8 150€); ils reçoivent dans la majorité des cas une indemnité supérieure au double de l’indemnité légale.

 

⇒ Ce qui permet d’obtenir des indemnités plus conséquentes :

 

*La CSP : alors que les indemnités des employés et des ouvriers sont très proches de l’indemnité légale, et ce quelle que soit l’ancienneté du salarié, les cadres obtiennent des indemnités nettement plus favorables. Les techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise se trouvent dans une situation intermédiaire.

 

*Les conventions collectives : les cadres bénéficient ainsi des conventions collectives les plus intéressantes en termes d’indemnité; ils sont quasiment les seuls à avoir des conventions collectives plus favorables que le minimum légal. Alors que l’impact de la convention collective est quasi inexistant pour les salariés de moins de 3 ans d’ancienneté, la négociation collective permet un surplus de 40% par rapport au minimum légal pour les cadres de plus de 3 ans d’ancienneté et de 8% pour les techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise; l’effet de la convention est quasi nul chez les ouvriers et les employés, un nombre élevé de conventions collectives ne leur assurant que le minimum légal.  

 

*L’indemnité dépend de la négociation avec l’employeur. Ouvriers et employés n’ont qu’un faible pouvoir de négociation (moins de 3% de surplus d’indemnité). A contrario, les cadres parviennent à négocier des indemnités : un surplus de 27% du minimum légal chez les cadres de plus de 3 ans d’ancienneté et de 25% chez les cadres de moins de 3 ans d’ancienneté. Pour les techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise, la négociation avec l’employeur est également significative, bien que plus marquée pour les salariés ayant plus de 3 ans d’ancienneté (surplus de 17%). 

On constate un manque de connaissance chez les non-cadres (surtout ouvriers) en ce qui concerne les modalités de la rupture : 57% des cadres ont obtenu des renseignements avant la signature de leur rupture, contre 34% chez les ouvriers et 39% chez les employés.

42% des cadres déclarent avoir négocié leur indemnité et 43% avoir eu une discussion avec leur employeur sur le mode de calcul de l’indemnité de rupture vs 16% et 13% chez les employés et les ouvriers (négociation de leur indemnité), et 28% et 25% (discussion du mode de calcul de l’indemnité avec leur employeur)

 

*Les salariés ayant eu recours à une assistance (5,6% des salariés concernés) sont parvenus à négocier significativement leur indemnité. Ce recours bénéficie nettement aux cadres, qui sont un peu moins de la moitié à négocier significativement leur indemnité quand ils ont bénéficié d’une assistance, tandis qu’ils ne sont qu’un tiers dans le cas contraire. Les techniciens, contremaîtres et agents de maîtrise voient aussi leurs capacités de négociation augmenter en cas d’aide extérieure (33% contre 18,5%). Les effets du recours existent également pour les employés et les ouvriers, qui sont respectivement 20% et 17% à négocier significativement leur indemnité en étant bénéficiaires d’une assistance contre 10% et 8% lorsqu’ils n’en ont pas reçu.

Les salariés ayant reçu une assistance sont plus âgés, ont plus d’ancienneté et travaillent dans des entreprises de taille plus importante; l’âge et le sexe influent peu sur la capacité à négocier. 

 

*Pour les employés et les ouvriers, le secteur d’activité intervient peu dans la capacité du salarié à négocier son indemnité. Chez les cadres, des écarts apparaissent selon le secteur d’activité; les indemnités de rupture sont très élevées dans le secteur des transports et de façon moins marquée dans l’industrie, l’immobilier, l’information et la communication, les activités financières et d’assurance;  elles sont faibles dans les secteurs de l’hébergement et de la restauration, le commerce, l’enseignement, la santé. 

 

*La taille de l’entreprise se conjugue avec la CSP : ci-dessous le % de ceux ayant obtenu une indemnité supérieure d’au moins 50% à l’unité légale.

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Lorsque les salariés ont envisagé avec leur employeur un autre type de rupture de contrat, les cadres sont 35% à citer le licenciement individuel contre 27% des employés et 28% des ouvriers; en revanche, la démission a été plus souvent citée chez les employés (61%) et les ouvriers (59%) que chez les cadres (49%). Les ouvriers et employés négocient finalement assez peu.