Une rare étude sur les métiers d’art.


"l’impact de la crise de la covid-19 et les nouvelles mutations du secteur des métiers d’excellence et métiers d’art", Assemblée Nationale, rapport N° 5038, février 2022

L’intérêt est à l’observation de la diversité des statuts constitutifs de ce secteur, les caractéristiques des entreprises (surtout des très petites) et leur situation face au Covid.

 

Le rapport débute sur un long texte relatif à la présence des métiers d’art dans notre histoire.

 

⇒ Leur nombre

 

– Pour l’INMA (Institut National des Métiers d’Art) et la DGE, au moins 60 000 entreprises des métiers d’art et du patrimoine vivant étaient en activité en 2019, et 150 000 actifs, avec un chiffre d’affaires de 19Md€ dont 8 à l’export,

 

 – Pour la chambre des métiers et de l’artisanat (CMA France), ce sont 69 000 entreprises artisanales qui relèvent des métiers d’art. Ce secteur emploierait près de 95 000 personnes, dégagerait un chiffre d’affaires de 8Md€ dont 727M€ réalisés à l’export,

 

 – Pour la direction générale de la création artistique du ministère de la culture, plus de 50 000 entreprises, plus de 60 000 emplois et un chiffre d’affaires cumulé estimé à 18Md€ (15,4Md€ pour les entreprises du patrimoine vivant).

 

♦ Ainsi, le nombre d’entreprises « métiers d’art » serait compris entre 60 000 et 70 000. Le nombre de salariés varierait selon les chiffres entre 60 000 et 150 000 personnes. Toujours aussi difficilement cernable, le chiffre d’affaires du secteur oscillerait entre 8 et 18Md€ selon le périmètre retenu.

 

♦ Leur nombre est en progression de plus de 33% depuis 2005 ; elle est liée à l’importance du nombre de micro-entrepreneurs ; 81% de ces entreprises sont unipersonnelles ; 66% des dirigeants non-salariés sont micro-entrepreneurs. L’emploi salarié est en baisse de 21% depuis 2009.

⇒ Les différents statuts

-D’après la DGE, sur les 60 000 entreprises relevant des métiers d’art, 65% sont artisans, 18% professions libérales, et 10% artistes auteurs,

 

-Selon la maison des artistes et l’INMA, 4 400 professionnels des métiers d’art étaient inscrits à la maison des artistes en tant qu’artistes-auteurs à la fin 2012,

 

-Certains professionnels peuvent exercer en libéral (notamment les conservateurs-restaurateurs avec 1 400 personnes).

 

– En 2020, 1 370 entreprises labellisées “patrimoine vivant” étaient actives dans 8 univers de marché différents ; elles emploient 68 384 personnes, pour un chiffre d’affaires cumulé de 15,4Md€, avec, en moyenne, un chiffre d’affaires de 11M€ et un effectif de 50 personnes.

 

En 2013, le ministère de la culture et ses établissements publics employaient quelque 1 100 agents dans la filière des métiers d’art, ayant le statut de fonctionnaire ou de contractuel de la fonction publique.

 

-De nombreuses personnes travaillant dans le secteur des métiers d’art sont également salariées : la filière bijouterie, joaillerie, orfèvrerie des pierres et perles emploie près de 15 000 salariés et leurs entreprises sous-traitantes (1 000 entreprises pour la filière BJOPP).  

⇒ Les caractéristiques des entreprises

– Concernant la taille des entreprises, 70% des entreprises n’ont pas de salarié, 13% salarient entre 1 et 3 personnes, et 9% seulement emploient plus de 10 salariés.

 

– La moitié des entreprises relève de deux secteurs : ameublement et horlogerie bijouterie vs 10% pour le secteur du textile et de l’habillement, tandis que les secteurs bois, pierre, terre et cuir représenteraient entre 5 et 10% pour chaque secteur.

 

– 28% des entreprises sont situées dans des communes rurales, notamment dans les domaines de la coutellerie (46%), de la céramique, du bois d’ameublement, de la taille de pierre, alors que 35% seraient situées dans des unités urbaines de plus de 200 000 habitants, dont Paris (58% pour la bijouterie joaillerie).

 

– La moitié des dirigeants sont des femmes (60% sont des micro- entrepreneurs), notamment dans la céramique (72%), le secteur textile habillement ainsi que le secteur de la bijouterie fantaisie (88%).

⇒ Évolution du secteur

♦ Deux éléments sont particulièrement vecteurs d’inquiétude : près de 30% des dirigeants non salariés sont âgés de plus de 55 ans (près de 40% pour les non microentrepreneurs vs 22% pour les micro-entrepreneurs) ; les revenus annuels sont inférieurs à ceux des autres artisans.

 

♦ Mais le secteur de l’artisanat est un secteur attractif, qui attire de nombreux adultes en reconversion professionnelle : d’après CMA France, environ 1 créateur d’entreprise artisanal sur 3 provient d’un autre univers professionnel, avec probablement 15% d’anciens cadres ou professions libérales issues de moyennes et grandes entreprises. Par ailleurs, les apprenants en reconversion sont surtout des diplômés de l’enseignement supérieur, dont 57% de femmes.

 

Les effectifs d’apprentis dans les diplômés menant à des métiers d’art sont passés de 39 000 en 2017 à 47 800 en 2020, soit une augmentation de près de 20% en 4 ans, inférieure toutefois à celle des effectifs d’apprentis dans leur ensemble (+45%).

⇒ Les entreprises face au covid

♦ D’après l’enquête réalisée par l’INMA en novembre 2020, les entreprises des métiers d’art ont enregistré une perte de 50% de leur chiffre d’affaires annuel sur l’année 2020 ; un sondé sur 5 a subi une perte de moins de 20% de son chiffre d’affaires par rapport à l’année 2019 ; de même, seul un sondé sur 5 semble être parvenu à vendre en ligne sur la période. 25% déclarent avoir pâti d’annulations de chantiers de commande, de difficultés de trésorerie, ou encore d’annulation des formations.

 

Les entreprises labellisées « Entreprises du patrimoine vivant » résistent de manière globale mieux à la crise : ainsi, au 1er semestre 2020, la moitié d’entre elles enregistrent moins de 20% de pertes de chiffre d’affaires semestriel (contre 50 à 60% pour la moyenne des entreprises du secteur) ;

 

♦ 76% ont subi des annulations d’évènements, tandis que 35% d’entre eux ont dû subir une fermeture de leurs points de vente traditionnels. 40% déclarent que la crise aura un effet négatif sur leur politique ultérieure d’accueil d’apprentis.

La crise sanitaire a mis en exergue la grande dépendance des professionnels des métiers d’art aux foires et salons : 96% des entreprises interrogées réalisent une partie de leur chiffre d’affaires lors des foires et salons, en moyenne à hauteur de 65%.

 

♦ Globalement, plus l’entreprise emploie de salariés, mieux elle parvient à encaisser le choc de la crise sanitaire ; plus les entreprises sont anciennes, plus la résistance à la crise augmente (plus de 40% des entreprises de plus de 50 ans enregistrent une perte de chiffre d’affaires de moins de 20% sur les 2 semestres 2020 vs plus de 20% des entreprises de moins de 10 ans déplorent une perte de chiffre d’affaires de plus de 80%) ; les entreprises travaillant en « B to B », réalisant plus de 60% de leur chiffre d’affaires auprès d’une clientèle professionnelle résistent mieux.

⇒ Les aides reçues

– Selon une étude menée par Ateliers d’art de France en juillet 2020, 81% des entreprises du secteur ont bénéficié de mesures d’aide, dans le cadre du fonds de solidarité.

 

– D’après l’étude de l’INMA, 58% des répondants ont bénéficié du fonds de solidarité, qui est la principale aide perçue (surtout par les moins de 3 salariés).

 

– En ce qui concerne le PGE, ce sont les entreprises de plus de 50 salariés et celles dont la clientèle est majoritairement tournée vers les professionnels qui y ont eu le plus recours.

 

– Noter que 30% n’ont pas su comment faire leur demande d’aide, n’ont pas été bien identifiés par l’administration pour percevoir les aides, ou avaient honte de demander des aides ; une entreprise sur 5 n’ayant pas recouru aux aides se serait considérée, à tort ou à raison, comme inéligible aux aides. Enfin, 53% des professionnels interrogés par l’INMA ont jugé les aides perçues pas adaptées ou peu adaptées à la crise.

 

Le rapport formule 34 propositions

 

Pour en savoir davantage : i5038 (assemblee-nationale.fr)