Plaine Commune, une action coordonnée entre acteurs, avec la volonté d’inciter à la création locale d’entreprises adaptées au territoire.


"Emploi et développement économique dans les quartiers prioritaires Tome I, RAPPORT 2018", ONPV/CGET, lu avril 2019

Méthodologie : une enquête menée auprès des acteurs de l’entrepreneuriat et du développement économique à Plaine Commune via 17 entretiens avec les salariés de 13 structures et certains bénévoles. Parallèlement, une observation participante dans le réseau Initiative Île-de-France a permis de consulter au quotidien les acteurs intermédiaires sur leur stratégie, leurs pratiques et leurs logiques d’action. Des observations lors des réunions, des comités de pilotages des dispositifs, dans la pépinière et des entretiens avec des entrepreneurs ont permis de compléter l’enquête et les données statistiques.

Cette recherche a été menée dans le cadre d’une thèse portant sur l’ancrage territorial des entrepreneurs en QPV, financée dans le cadre d’un Cifre contractualisé par Initiative Île-de-France, membre du réseau Initiative France.

 

Les élus de Plaine Commune ont mis en place une action coordonnée des intervenants, pour ancrer sur le territoire, des entreprises, notamment en direction des besoins de la population (produits/services et emplois locaux).

 

Certaines collectivités comme Plaine Commune ont des politiques de développement économique local visant à aider les habitants, notamment ceux des quartiers de la politique de la ville, à créer des entreprises. Ces politiques contribuent à favoriser l’insertion des habitants des quartiers par la création de leur propre emploi et à apporter un dynamisme économique dans les quartiers.

Les acteurs publics locaux s’appuient sur un réseau d’associations, qui jouent le rôle d’intermédiaires pour susciter les vocations d’entrepreneurs et soutenir les innovations et les projets de création et de reprise d’activité. Pour contribuer au développement économique des QPV, ces acteurs intermédiaires adaptent les processus d’accompagnement des entrepreneurs aux besoins spécifiques des entrepreneurs de ces quartiers.

Quelques données sur les QPV de Plaine Commune

Les QPV de la Plaine Commune regroupent en 2015, 279 112 habitants (67% de la population de la communauté d’agglomération de la Plaine Commune), avec un indice jeunesse de 4,1 (vs 2,2 pour l’agglomération, et 1,3 pour la métropole du Grand Paris); la part des étrangers y est de 29% (vs 15 pour le Grand Paris); le taux de pauvreté y est de 36% vs 18 pour le Grand Paris. 55% des 15-64 ans sont en emploi (67 pour le Grand Paris). Noter la forte proximité des données de l’agglomération entiére avec les QPV.

75% des 17 275 établissements existant n’ont pas de salarié (69 dans l’agglomération et 74 dans la métropole).

⇒ L’action envisagée par les élus locaux

La Miel (Maison pour l’initiative économique locale) est créée en 1998  à l’initiative d’élus de Plaine Commune, pour incarner une politique publique novatrice; cette politique, s’appuie sur les compétences de la population locale pour porter le développement économique destiné à améliorer ses propres conditions de vie. Toutefois, 20 ans après la création de La Miel, si les acteurs publics et intermédiaires semblent convaincus de l’utilité de cette démarche, sa mise en œuvre dans les quartiers prioritaires fait encore débat.

 

3 thèmes de débat sont associés à la politique d’entrepreneuriat pilotée par les acteurs publics : la spécificité d’un équipement d’hébergement des entreprises aux Quatre Mille (La Courneuve), le conseil délivré aux entrepreneurs rencontrant des situations de précarité notables, la substitution d’une politique d’entrepreneuriat à une politique d’emploi-insertion. Les acteurs intermédiaires à Plaine Commune participent à la construction de politiques locales de développement économique, en adaptant leurs dispositifs de soutien aux entrepreneurs pour les rendre plus « spécifiques » aux besoins de ceux qui entreprennent dans les QPV. Cela implique parfois de faire évoluer leur rôle initial.

Il s’agit notamment de favoriser les liens entre les acteurs économiques locaux, notamment les relations de confiance, les échanges de savoirs et des formes de solidarité territoriale.

Parce que les habitants concernés appartiennent à des « mondes » différents du point de vue de leur langage (au sens large), des lieux fréquentés, des pratiques quotidiennes, les acteurs intermédiaires ont conjugué les proximités spatiale et institutionnelle.

⇒ Plusieurs actions se déploient en cohérence :

-Un service d’amorçage de projet informent les entrepreneurs et offrent du conseil individuel et gratuit, adapté à la situation personnelle de l’entrepreneur.On y reçoit aussi des entrepreneurs sans papiers, des entrepreneurs ne parlant pas français, des entrepreneurs ne pouvant pas payer leur loyer, des entrepreneurs désormais privés d’allocations chômage ou cumulant plusieurs emplois, des entrepreneurs qui ne connaissent pas les codes de la création; on se doit de régler ces situations difficiles afin que la personne se lance sereinement dans un projet entrepreneurial ou reporte son projet.

 

-Les acteurs publics soutiennent la mise en place d’un réseau de dirigeants de TPE locales par la principale association d’entreprises à Plaine Commune, Plaine Commune Promotion; un bénévole de sa commission TPE encourage les dirigeants des TPE à se rencontrer et se présenter les uns aux autres lors de soirées, pour, à long terme, « faire du business entre eux ». Il s’agit d’aider les entrepreneurs à étoffer leur carnet d’adresse et se mettre en réseaux, même si ces échanges ne sont pas toujours marchands. Mais les patrons de TPE sont peu nombreux à participer.

 

– Une pépinière d’entreprises a été créée pour héberger les entrepreneurs; en effet, la cherté ou la rareté des locaux d’activité à Plaine Commune est un problème soulevé par les responsables des associations d’aide à la création d’entreprise et constitue un frein au développement des entreprises à Plaine Commune, voire la principale raison pour laquelle ils quitteraient le territoire.

Mais ces derniers sont moins diplômés que ceux qui entrent dans la pépinière; l’objectif est de conjuguer ce public, choisi pour leur motivation à agir pour le quartier, à s’intégrer aux créateurs plus classiques en pépinière (entreprises à potentiel), venant de toute l’Ile-de-France.

La pépinière apporterait un « changement d’image » au quartier, avec l’arrivée d’ingénieurs et de designers parmi les entrepreneurs et les salariés qui travaillent à la pépinière. Celle ci est devenue de fait un équipement attractif (90% d’occupation en 2017).

 

-Apportant leur soutien aux entrepreneurs, les associations de microcrédit, par exemple comme l’Adie, réalisent des « permanences » en déplaçant leurs salariés régulièrement dans des lieux d’accueil à proximité ou dans les quartiers prioritaires.

Il s’agit notamment de détecter les habitants dont le métier se prête à une activité indépendante, qu’ils pratiquent parfois déjà de manière informelle.

 « Créer de la valeur » là où « sont » les gens; l’ambition n’est pas de déplacer l’activité pour lui donner de meilleures perspectives de survie, mais de donner un cadre réglementaire (formalisation) et d’injecter une petite somme d’argent dans l’entreprise (micro-crédit) pour l’aider à se développer là où elle est déjà implantée, là où l’entrepreneur a construit son réseau social.

 

En savoir davantage : http://capville.fr/le-centre-de-ressources/actualites/502-rapport-onpv-2018-emploi-et-developpement-economique-dans-les-quartiers